C'était il y a pile une semaine. "C'est un jour un peu particulier" pour Cédric Rizzo, rescapé de l'attaque terroriste du Bataclan, vendredi dernier, ayant fait au moins 89 morts. Même si, concède-t-il, "des jours particuliers" depuis vendredi, il y en a eu beaucoup. "Forcément, en se réveillant, on pense tout de suite à la même chose, tout le temps". Puis, "dans le courant de la journée, on essaie de penser à autre chose", explique-t-il à l'antenne d'Europe 1.
Vendredi dernier, cet homme d'une quarantaine d'années était au premier rang du concert du groupe de rock Eagles of Death Metal. Au bout d'une dizaine de minutes après l'irruption des assaillants dans la salle, il est parvenu à s'échapper par une issue de secours.
Parler, "un besoin". Aujourd'hui, le rescapé est prêt à parler, à témoigner. "C'est un besoin. Ça me fait du bien, ça me permet de réaliser que ce n'était pas un cauchemar". Même si, pour l'instant, rien n'efface le bruit, le mouvement de panique, les détonations, les cris qui résonnent encore dans sa tête. "Lorsqu'on voit le groupe quitter la scène, on comprend qu'il est en train de se passer un truc très grave, tout le monde se couche", se souvient-il, lui qui était tout proche de la scène, ce qui lui a sauvé la vie.
"Le premier réflexe, c'est faire le mort". "Le premier réflexe, c'est de rester à plat ventre, faire le mort, ne plus bouger." Ce vendredi soir, le concert affiche complet, avec 1.500 spectateurs. Dans cette fosse bondée, difficile de se coucher : "On est les uns sur les autres". "On n'ose pas se lever, évidemment", raconte le quadragénaire. "Mais très vite, on lève la tête et on voit qu'ils sont en train d'abattre de sang-froid les gens autour d'eux, un par un. Et on se dit : 'Si je reste là, ça va finir par m'arriver aussi'."
"J'ai rampé, j'ai rampé". Certains autour de lui commencent à se lever pour tenter de s'échapper par une issue de secours. "J'ai suivi ce mouvement-là, j'ai rampé. J'ai rampé au milieu de gens qui étaient blessés, de gens qui étaient morts. […] Et on ne pense à rien, sauf à sauver sa peau." Une fois dans la rue, Cédric Rizzo, qui a bien vu les terroristes, s'est rendu à un commissariat pour tenter de décrire ce qu'il se passait : "Je voulais signaler tout ce que je pouvais". Objectif : se "rendre utile".
En concert dès mardi. Mais s'il est revenu de cet enfer, ce soir-là, Cédric Rizzo a aussi perdu un ami, venu de son côté. Cet ami, Thomas Duperron, était responsable de la communication à La Maroquinerie, une autre salle de concert parisienne. Pour autant, Cédric Rizzo ne va pas cesser de vivre. Dès mercredi, il est retourné travailler. Et mardi, soit quatre jours à peine après la sanglante attaque, il s'est rendu de nouveau à un concert : "C'était super important pour moi, l'une des choses les plus importantes. Ça fait partie de ma vie, c'est une passion", insiste-t-il.
Ce concert, il avait prévu d'y aller depuis longtemps. "J'avais un vrai besoin physique d'y aller. […] Une envie de se retrouver à l'endroit où on aime être le plus". "Pas pour tourner la page", assure-t-il, mais "pour reprendre une vie normale, une vie telle que je l'aime. Telle que je la vivais avant vendredi et telle que j'ai envie de la vivre".
"Pas de peur, mais une unité, une fraternité". Dans la salle, "pas de peur", mais peut-être "des regards un peu différents. On a tendance à regarder un peu autour de soi, ce qu'on ne fait pas forcément d'habitude", a-t-il confié. Mais surtout, ce que Cédric a trouvé, c'est "une unité, une fraternité…", rapporte-t-il, ému. "Quelque part on a énormément d'amis qui ont été touchés. C'est une grande famille, la famille de la musique..." Et de conclure : " Il y avait un courant qui passait. Une émotion particulière, une sorte de communion. C'était très fort."