L'accès de violence est aussi brusque qu'intense : en deux nuits, des dizaines de voitures ont été brûlées dans le quartier sensible du Grand Mirail, à Toulouse. Dimanche, de premières échauffourées ont opposé une centaine de jeunes aux forces de l'ordre à la Reynerie et à Bellefontaine, des parties du quartier classées en zone de sécurité prioritaire (ZSP). Lundi soir, de nouveaux affrontements ont éclaté à la nuit tombée. Dix-huit personnes dont six mineurs ont été interpellées pour violences, destructions de biens par incendie ou outrage, selon la préfecture. Alors que certains pourraient être jugés en comparution immédiate dès mercredi, Europe 1 revient aux racines de ce soudain embrasement.
Un contrôle d'identité dimanche. Selon les autorités, la tension dans le quartier est montée dimanche après-midi, suite au contrôle d'une femme en burqa refusant de se soumettre aux vérifications de la police. Elle effectuait un jogging au moment de son interpellation, a indiqué Arnaud Bavois, Directeur départemental de la sécurité publique (DDSP). D'après France 3, la femme a présenté "une photocopie de mauvaise qualité de sa carte nationale d'identité", avant de refuser de retirer son voile. Elle se serait ensuite mise à crier, attirant l'attention des passants tandis que les policiers la conduisaient jusqu'à leur véhicule.
Une vidéo de mauvaise qualité, qui circule sur les réseaux sociaux, montre une partie de la scène, filmée de loin. On y voit plusieurs policiers plaquant une femme voilée au sol. La chaîne indique qu'une trentaine de personnes s'en sont alors prises aux fonctionnaires, qui ont riposté en utilisant notamment des flashballs.
"Il y avait clairement une volonté de s'en prendre aux forces de l'ordre. Ça faisait bien longtemps qu'on n'avait pas vu ça", a réagi Arnaud Bavois auprès de La Dépêche. Mardi, à l'issue de sa garde à vue, la femme s'est vue signifier par le parquet de Toulouse sa convocation devant la justice le 17 mai.
Une rumeur sur la prison de Seysses. Mais ces violences pourraient également avoir été déclenchées par une rumeur selon laquelle des gardiens de la prison de Seysses, au sud de Toulouse, auraient été à l'origine du décès samedi d'un détenu, originaire du Grand Mirail. "C'était une personne forte mentalement. Alors son suicide me paraît impossible. Je n'y crois pas", a témoigné au micro d'Europe 1 Melissa, qui connaissait le prisonnier. "On veut savoir ce qui s'est passé réellement et apaiser les choses. La situation s'aggrave de jour en jour."
En guise de protestation, pour réclamer la "vérité" sur la mort de cet homme, une centaine de détenus ont refusé de regagner leurs cellules après leur promenade à Seysses, lundi après-midi. Une enquête judiciaire a été ouverte pour "recherche des causes de la mort" par le parquet de Toulouse, qui a souligné que l'autopsie avait confirmé que les causes du décès du détenu, qui se trouvait au quartier disciplinaire, "sont compatibles avec une mort par pendaison".
Une politique sécuritaire durcie. Une troisième hypothèse est avancée par Didier Martinez, du syndicat SGP-Police. "Depuis quelques semaines, on assiste à une offensive de la police dans ces quartiers, qui porte atteinte aux trafics. On a fait de grosses saisies. Dès lors que la police fait son travail et occupe les quartiers, tout est prétexte à en découdre", estime-t-il. "On peut donc considérer que le contexte global explique un peu cette montée en tension, mais ne justifie en rien de telles prises à partie de nos collègues." En attaquant les forces de l'ordre, certains habitants de ces quartiers chercheraient à les "chasser" du Grand Mirail.
Interrogé par France 3, un responsable associatif du quartier penche également pour des "prétextes" utilisés pour s'en prendre à la police, dans un contexte sécuritaire renforcé. Le Grand Mirail, qui compte plus de 40.000 habitants, est en proie au trafic de drogue et aux règlements de comptes. Il a été retenu par le gouvernement pour l'expérimentation de la police de sécurité du quotidien (PSQ), qui mise sur une nouvelle méthode de travail, collective, et de nouveaux outils, pour lutter contre l'insécurité.