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Hausse des taux, baisse des transactions... Pourquoi autant de faillites dans le secteur de l'immobilier ?

Maud Baheng Daizey . 3 min
immobilier
Photo d'illustration © Mathieu Thomasset / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Le secteur de l’immobilier connaît une véritable crise depuis 2020 et le déclenchement de la crise du Covid-19. De multiples facteurs se sont ajoutés depuis pour expliquer le nombre record de défaillances dans le secteur, notamment en 2024.

La crise sanitaire peut sembler loin, mais ses conséquences sont encore bien visibles, et particulièrement le secteur de l’immobilier français. Si les ventes de biens ont explosé et dépassé le million en 2019 dans l'Hexagone, le Covid a provoqué une grande régression du marché de laquelle ce dernier peine à s'extirper. 

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“Depuis 2019, 5.000 agences immobilières ont fait faillite, dont 1.245 agences en 2024 qui ont mis la clé sous la porte”, rappelle Christelle Dupuy, experte immobilier et présidente d’Arthurimmo.com Paris 7.

Le coronavirus, initiateur indirect de la crise 

Depuis quatre ans, les possibles acheteurs sont frappés d’un certain attentisme, liés à plusieurs facteurs découlant tous de cette crise sanitaire. Notamment le relèvement des taux directeurs dans la zone euro par la Banque centrale européenne (BCE) en 2022.  

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En conséquence, les crédits immobiliers proposent des offres moins avantageuses pour les ménages. De mars 2022 à décembre 2023, les taux moyens d’emprunt sont passés de 1,13% à 4,2%, paralysant les vendeurs et les potentiels acquéreurs. “Quand on passe de 1 à 4%, cela grippe le marché”, atteste Christelle Dupuy. “Sans compter la crise de l’emploi” découlant de la situation sanitaire, conduisant les Français à la prudence et à moins emprunter dès 2020. 

La hausse des divorces ainsi que le manque de matières premières ont également contribué au ralentissement de la vente de biens en France. “Le nombre de permis de construire a considérablement baissé. Un bon nombre de promoteurs ont mis la clé sous la porte et des investisseurs se sont aussi retirés du marché avec la hausse des taux”, commente Christelle Dupuy. “Depuis 2019, 5.000 agences immobilières ont fait faillite, dont 1.245 agences en 2024 qui ont mis la clé sous la porte”, a-t-elle rappelé. 

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Selon l’experte et agente immobilier, “il y a eu un effet ciseaux et un effet retard, car les conséquences de la crise de 2020 se sont particulièrement fait ressentir à partir de 2022.” Comme un malheur n’arrive jamais seul, ces facteurs ont également entraîné une nette augmentation des prix des loyers entre 2021 et 2023 : l’indice de référence des loyers est ainsi passé de 0,9% en 2022 a 1,63% en 2023. Face à une telle escalade, les locations ont donc pâti de la situation. 

Selon Nexity, premier promoteur immobilier en France, “la situation du marché immobilier en 2023 a été marquée par une baisse notable des transactions, avec environ 950 000 ventes sur l'année, soit une baisse de 15% par rapport à l'année précédente.” 

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"Le marché a été totalement dérégulé"

Autre point négatif, l’erreur de collecte de l’Etat français en 2023 lors de la récolte de la taxe d’habitation : 1.3 milliard d’euros prélevés que l’État doit rembourser. Sauf qu'entre temps, une grande partie des Français soumis à cette taxe ont constaté une augmentation de cette dernière, nourrissant l’effet “boule-de-neige" de la crise du secteur.

Certains logements eux-mêmes posent problème, notamment les “passoires thermiques”. En 2021, 9% des logements voués à la location ont été retirés du marché, mais n’ont pas été compensés par des logements neufs. En cause, la baisse de construction de ces derniers depuis 2017. Cette année-là, 438.000 logements neufs sont sortis de terre, contre 288.000 en 2024. Sur les logements neufs construits, l’année 2024 porte également un triste record : seulement 146.000 de construits, contre 321.000 en 2006 ou 193.000 en 2020. 

"Le marché a été totalement dérégulé : le prêt à taux zéro a disparu pour les maisons et a été minoré pour les appartements, les clients n’ont pas pu acquérir ou se loger. Les aides liées aux minorations d’impôts tel la loi Pinel ont disparu ou réduit, entraînant la baisse des ventes. C’est un cercle vicieux”, analyse Christelle Dupuy. 

Par ailleurs, l’absence de vote de budget pour 2025 a freiné les possibles acheteurs et vendeurs, qui ont alors été plus attentistes. "Les projets en attente de crédits ont également connu un allongement de leur délai d’obtention, bloquant pour un moment les ventes et locations", ajoute Christelle Dupuy. Face à une telle situation, 2025 constituera-t-elle une nouvelle année de recul pour le secteur ? Pas si sûr, selon les prévisions de la FNAIM, la Fédération Nationale de l’Immobilier.

Lueur d’espoir pour 2025

“Les volumes de transactions pourraient augmenter de 6%, pour atteindre environ 825.000 ventes d'ici à la fin de l'année. Cette progression, bien que modérée, représenterait un premier pas vers une reprise durable”, a affirmé la Fédération le 21 janvier 2025 dans un communiqué. Elle a également rappelé que le taux d’emprunt, relevé à 4,2% en décembre 2023, avait baissé pour atteindre les 3,37% en novembre 2024. Pour la FNAIM, “cette tendance devrait se poursuivre en 2025, avec une baisse attendue autour de 3 %."  

Pour Christelle Dupuy, le secteur a commencé "à sentir une amélioration fin 2024". "Il y a eu beaucoup d'attentisme de la part des vendeurs en début d'année, notamment dans les villes concernées par les Jeux olympiques. Beaucoup de propriétaires ont préféré faire de la location saisonnière pour vendre à l'automne 2024.” 

“Puis nous avons vu le marché reprendre avec des mandats supplémentaires, des mises en vente de nouveaux biens et des ventes en octobre et novembre. D'habitude, en termes de saisonnalité, c'est plutôt creux. Et là, ç'a été intéressant.” Un regain qui redonne de l'optimisme aux experts immobiliers.