Après la Tunisie et l'Egypte, tous les regards se sont tournés samedi vers l'Algérie. L'opposition avait appelé à une marche pacifique, interdite par les autorités. Des échauffourées entre forces de l'ordre et manifestants ont eu lieu avant-même le départ du cortège à Alger.
Entre 800 manifestants, selon la police, et 2.000, selon les organisateurs, se sont rassemblés dans la capitale algérienne. Ils ont réussi brièvement à forcer l'important dispositif des forces de l'ordre, qui les empêchaient de quitter la place du 1er Mai, avant de se retrouver à nouveau bloqués sur le chemin en direction de leur point d'arrivée, la place des Martyrs. Les manifestants ont crié "Algérie Libre" en arabe ou "Le régime dehors!". Parmi les manifestants se trouvait Ali Belhadj, un des chefs du Front islamique du salut, un mouvement dissout en 1992.
Plusieurs interpellations
Entre 25 et 30.000 policiers étaient mobilisés pour encadrer ce rassemblement. Des accrochages ont eu lieu avant le début de la manifestation alors que la police essayait de disperser les participants. Plusieurs personnes ont été interpellées, dont un député du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Othmane Maazouz. Dans un communiqué, le ministère de l'Intérieur a annoncé que 14 personnes avaient été brièvement interpellées puis relâchées. En tout début d'après-midi, la circulation avait timidement repris dans ce secteur auparavant entièrement bouclé par d'importantes forces de l'ordre entourées de dizaines de véhicules blindés.
Dans tout le pays, 300 interpellations ont été recensées par la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (LADDH). "Selon nos informations, il y a eu plus de 300 arrestations parmi les manifestants entre Alger, Oran (ouest) et Annaba (est)", a déclaré le président de la Ligue Mustapha Bouchachi.
Regardez ces images d'échauffourées entre manifestants et policiers :
Des chasse-neige transformés pour dégager les barricades et des canons à eau étaient postés. Une vingtaine de contre-manifestants ont crié fort leur soutien au président Abdelaziz Bouteflika, criant "Bouteflika n'est pas Moubarak", en référence au départ la veille du président égyptien Hosni Moubarak.
Pour le député du RCD, Tahar Besbas, l'Algérie "ne peut pas échapper au vent de démocratie" qui souffle sur le Maghreb. Malgré la forte présence policière pour encadrer le rassemblement, le député estime "qu'on ne peut pas avoir raison de la détermination du peuple algérien".
"Le pouvoir doit éviter un bain de sang" :
Alger bouclée à 25 km alentour
Alger était bouclée depuis vendredi. Les barrages de police à l'entrée de la ville avaient été renforcés. Les forces de l'ordre étaient postées le long des routes d'accès à la capitale, jusqu'à 25 kilomètres alentour. Tous les véhicules étaient fouillés. Et les trains en provenance de Kabylie, notamment, à l'est du pays, ne circulaient plus.
Plusieurs villes algériennes ont également connu des manifestations. A Oran, grande ville de l'ouest algérien où une manifestation avait aussi été interdite par les autorités selon l'opposition - ce que dément le ministère de l'Intérieur samedi -, un rassemblement de 400 personnes place du 1er novembre a été de courte durée et s'est achevé par une trentaine d'arrestations. Des marches ont aussi eu lieu en Kabylie dans l'Est, à Tizi Ouzou (à 105 km d'Alger), Boumerdes (à 60 km de la capitale), Bejaïa (à 260 km) et à Tipaza (80 km à l'ouest d'Alger).