Il y a des images. Caroline Sinz, la journaliste de France 3 frappée et agressée sexuellement jeudi par des hommes en marge des manifestations place Tahrir au Caire, a annoncé lundi avoir porté plainte pour viol.
"J’ai déposé une plainte pour viol en France", a indiqué Caroline Sinz, lundi sur France Inter. "Comme on a quelques images, ça peut peut-être aboutir".
La journaliste a une nouvelle fois raconté son calvaire. Un récit d’une violence extrême.
"Des dizaines d'hommes ont commencé à arracher mes vêtements, mes sous-vêtements et à me violer puisque lorsqu'il y a pénétration digitale, c'est un viol. C'est ce dont j'ai été victime pendant 45 mn environ. Heureusement que j'ai pu être sauvée par des hommes qui sont venus à mon secours", a-t-elle insisté.
"J'ai cru que j'allais mourir", avait-elle témoigné en direct sur France 3 :
Les cas se multiplient
Mais la reporter de France 3 est loin d’être une victime isolée. Le jour de l’agression de la journaliste de France 3, l'éditorialiste égypto-américaine Mona Eltahawy a elle aussi été victime de violences sexuelles. Conduite dans les locaux du ministère de l’Intérieur et maintenue en garde à vue pendant douze heures, elle avait été agressée par des policiers.
Le 11 février dernier, jour de la chute d'Hosni Moubarak, Lara Logan, journaliste de la chaîne américaine CBS, avait déjà été victime d'une agression sexuelle dans le secteur de la place Tahrir.
Des noms qui viennent s’ajouter à ceux d’une foule d’anonymes. "C'est un phénomène en Egypte. Il y a visiblement une énorme frustration chez les jeunes Egyptiens", a affirmé Caroline Sinz. "Il y a 11 femmes égyptiennes qui ont porté plainte pour agression sexuelle et pour viol. Elles ont subi des attouchements et des tests de virginité de la part de l'armée en février, lors de la révolution. Et ces plaintes n'ont toujours pas abouti", a déploré la journaliste.
"Il faut des femmes en Egypte"
Malgré ce climat de violence envers les femmes, la journaliste refuse de laisser la place aux seuls journalistes hommes en Egypte.
"Il faut des femmes en Egypte. D'ailleurs c'est une consoeur qui m'a remplacée", a dit Caroline Sinz, rentrée à Paris samedi. "J'ai couvert l'Irak puis la guerre, plein de pays compliqués. Je ne me sens pas plus exposée (qu'un homme), ce sont les compétences qui comptent".
Un avis que Reporter sans frontières n’a pas toujours partagé. Dans un premier temps, RSF a demandé aux rédactions de cesser d'envoyer des femmes en Égypte. Avant de rétropédaler quelques jours plus tard .
"Ça m'a beaucoup énervée parce que RSF devrait marquer sa solidarité. Les femmes ont déjà suffisamment de mal pour aller travailler à l'étranger. On est toujours dans un milieu extrêmement machiste dans la presse, quoi qu'on en dise, et c'est très important que les femmes soient là. On peut faire notre travail tout aussi bien qu'un homme", a conclu Caroline Sinz.