Génocide arménien : la communauté internationale divisée

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A la veille des commémorations du centenaire arménien, la communauté internationale ne s’accorde toujours pas sur ce qui s’est passé.

Vendredi, le monde entier aura les yeux tournés vers le passé. Plusieurs chefs d'Etat, dont le président Français, François Hollande, se retrouveront à Erevan, en Arménie, pour commémorer le centenaire du génocide arménien. Le 24 avril 1915, les arrestations d’Arméniens débutaient à Constantinople sur ordre de Talaat Pacha, le ministre de l’Intérieur ottoman.  Le gouvernement ottoman décidait de détruire une civilisation qui remontait à la Haute-Antiquité, en exterminant d'abord les élites arméniennes avant de s'en prendre à la population toute entière.

Ce tragique 24 avril ouvrit la voie à un crime de masse, au génocide de 1,5 million d’Arméniens entre 1915 et 1918. Pourtant, cent ans après, et alors que la Turquie nie farouchement le caractère génocidaire des massacres, la communauté internationale apparaît très divisée face à cette histoire et à la qualification de génocide. L'Organisation des Nations Unies n'a elle-même pas reconnu officiellement le génocide arménien. Seule une sous-commission de l'ONU a publié en 1985 un rapport qualifiant le massacre des Arméniens de génocide. Actuellement, une vingtaine de pays parle de génocide. 

Reconnaissance partielle, officielle, en débat ou refus catégorique… Europe 1 s’est penché sur la position des Etats sur le sujet.  

Les pays précurseurs. Le premier pays à reconnaître officiellement le génocide arménien ne se trouve pas en Europe. Il s’agit de l’Uruguay en 1965. Néanmoins, le pays ne parle pas de “génocide” mais de “martyr”. Chypre est le deuxième pays à reconnaître officiellement le génocide arménien en 1982, un an avant la proclamation unilatérale de la République turque de Chypre du Nord. 

L’Europe est aussi précurseur sur le sujet puisque le Parlement européen reconnaît officiellement le génocide dès 1987 suivi du Conseil de l’Europe en 1988. 

Les pays qui ont sauté le pas en 2015. Avec le centenaire du génocide, plusieurs pays ont décidé de sauter le pas cette année, déclenchant la colère de la Turquie. Mercredi, le Parlement autrichien a ainsi observé une minute de silence en mémoire du génocide arménien, une première dans ce pays autrefois allié à l’Empire ottoman et où ce terme n’avait jamais été endossé officiellement. En représailles, Ankara a rappelé son ambassadeur en Autriche. Un scénario qui rappelle ce qui s’est passé quelques jours plus tôt avec le Vatican. Le 12 avril et pour la première fois, le pape François évoque publiquement dans un discours le génocide des Arméniens. La Turquie rappelle là encore son ambassadeur au Vatican. 

L'Allemagne a, quant à elle, reconnu jeudi soir pour la première fois le "génocide" arménien par la voix de son président Joachim Gauck, qui a souligné la "coresponsabilité" allemande dans ce crime. "Nous devons également, nous Allemands, faire notre travail de mémoire", a-t-il déclaré, évoquant "une coresponsabilité, et même, potentiellement, une complicité dans le génocide des Arméniens". Jusqu’à présent, les Allemands, pour ne pas froisser leurs relations avec la Turquie, avaient choisi en 2005 une formule alambiquée pour évoquer le massacre “considéré par beaucoup d’historiens indépendants, de Parlement et d’organisations internationales comme un génocide”. Plus étonnant dans le contexte actuel, l’un des derniers pays à avoir reconnu officiellement le génocide est la Syrie par le biais de son Parlement le 19 mars dernier. 

Les pays qui ne veulent pas se fâcher avec la Turquie. Les Etats-Unis marchent sur des oeufs sur cette question car la Turquie est un allié de longue date de l’OTAN et joue un rôle stratégique dans les intérêts américains au Moyen-Orient. Si la Maison-Blanche appelle à reconnaître les faits, elle n’utilise jamais le mot “génocide”. Une prudence qu’observe aussi l’Angleterre. Si l’Ecosse ou encore l’Irlande du Nord ont officiellement reconnu le génocide arménien en 2010, Londres n’a pas suivi le mouvement, soucieuse de ne pas heurter la communauté turque britannique ainsi que ses bonnes relations avec Ankara. Enfin, Israel reconnaît un massacre d’ampleur mais refuse catégoriquement de parler de génocide. 

Et la France ? La France a reconnu publiquement le génocide arménien dans la loi du 29 janvier 2001. Le Parlement français aurait même voulu aller plus loin en adoptant en 2011 une proposition de loi condamnant la négation des génocides reconnus par l’Etat français dont celui des Arméniens. Mais la loi a été rejetée par le Conseil constitutionnel début 2012 car jugée contraire à la Constitution. François Hollande, alors candidat à l’élection présidentielle, avait fait part de sa volonté de sanctionner pénalement la négation du génocide arménien. Une promesse qui, pour l’instant, n’a pas vu le jour. 

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