François Hollande l’a dit et répété tout au long de sa campagne électorale : il ne se satisfait pas de l’actuel pacte de stabilité européen, entièrement tourné vers la réduction des déficits. Désormais élu, il va donc lancer de nouvelles négociations pour que cette austérité soit accompagnée d’une relance de la croissance. Une telle stratégie, encore inimaginable il y a quelques mois, est désormais possible et pour cause : l’élection française a redistribué les cartes.
Un peu de rose dans une Europe conservatrice
L’arrivée de François Hollande à l’Elysée met fin à une vague bleue qui a recouvert l’Union européenne depuis l’éclatement de la crise financière. Gordon Brown en Grande-Bretagne, José Luis Zapatero en Espagne, José Socrates au Portugal, Georges Papandréou en Grèce : tous ont été écartés du pouvoir au profit de gouvernements conservateurs.
Sur les vingt-sept pays de l’UE, tout juste une dizaine compte des socialistes au pouvoir, parfois comme seuls membres d’une coalition. La victoire du socialiste François Hollande marque donc un virage qui ne peut que réjouir la gauche européenne.
Un partisan de la relance en plus
Mais au-delà des rapports de force partisans, c’est surtout une autre vision de la sortie de crise qui gagne du terrain. Plusieurs chefs d’Etats européens ont ainsi rapidement appelé les 27 à un changement de cap, à l’image du Premier ministre belge, Elio Di Rupo, qui a demandé "une stratégie ambitieuse de relance".
D’autres capitales pourtant favorables à la rigueur prônent également un tel changement de cap, à l’image de l’Italie de Mario Monti. Le président de la Banque centrale européenne (BCE), Mario Draghi, est aussi sur la même ligne. La France n’est donc pas si isolée sur la scène européenne pour ajouter un volet croissance au pacte budgétaire de l’UE.
Bruxelles tente d’arrondir les angles
L’Allemagne, l’Eurogroupe ou encore la Commission européenne s’opposent à toute renégociation d’un pacte si difficile à négocier. 25 États-membres l'ont signé et trois l'ont déjà ratifié, ce qui complique toute remise à plat. Les partisans de la rigueur reconnaissant en revanche qu’il est désormais nécessaire de stimuler la croissance. De nouvelles négociations vont donc commencer.
Hasard du calendrier, la Commission européenne présente d’ailleurs mardi un nouveau plan pour la croissance. Il s’agit surtout de mesures déjà débattues et acceptées, mais cela montre que les institutions européennes prennent le sujet au sérieux, un argument que François Hollande ne manquera pas d’invoquer face à Angela Merkel le 16 mai prochain.
La chancelière allemande va être d'autant plus attentive à cette nouvelle coalition pro-croissance que son entourage l'y invite. Mardi matin, le quotidien économique allemand Handelsblatta en effet révélé que plusieurs conseillers d'Angela Merkel l'ont invité à assouplir sa position. C'est le message que lui auraient envoyé Ferdinand Fichtner, le chef des conjonctures au sein de l'Institut allemand pour la recherche économique (DIW), ou encore Peter Bofinger, conseiller économique du gouvernement, qui a déclaré qu'il "est temps de repenser cette stratégie". Prochain épisode de ce feuilleton européen à la fin du mois de mai, lorsque les dirigeants européens doivent se rencontrer pour tenter de concilier rigueur et croissance.