Ce vendredi est-il celui de tous les dangers dans le monde arabe ? C'est ce que craignent plusieurs spécialistes de l'islam, interrogés par Europe1, après la flambée de violences antiaméricaines qui ont éclaté cette semaine en Egypte, au Libye et au Yémen suite à la diffusion d'une vidéo dénigrant grossièrement les musulmans.
Pourquoi ce vendredi est-il "un jour explosif" ? "C'est un jour à haut risque d'abord parce que c'est un jour de prière collective, mais aussi parce qu'il y a eu un appel de tous les groupes islamistes égyptiens pour manifester ce jour après la prière", a expliqué vendredi sur Europe1 l'islamologue Mathieu Guidère. Enfin, hasard du calendrier, "il y a en même temps la visite du pape au Proche-Orient, au Liban plus précisément", a pointé ce spécialiste du monde arabe qui juge que toutes ces circonstances font de ce vendredi "un jour explosif" notamment "aux abords de la place Tahrir".
Au-delà de l'Egypte, y a-t-il un risque de contagion ? D'après Malek Chebel, spécialiste de l'islam, joint par Europe1, "il y a une capillarité très grande entre toutes les mosquées du monde, surtout si les autorités religieuses de ces pays-là n'interviennent pour appeler à l'apaisement." Pour ce spécialiste, le déclenchement du mouvement peut être comparé à celui provoqué par les caricatures de Mahomet qui avait embrasé le monde arabe en 2005. A une exception près : "cette fois, l'affaire est partie d'une vidéo très médiocre, très malsaine et qui pourrait donc donner lieu à un feu plus important."
Pourquoi ce film anti-musulman a mis le feu aux poudres ? Mathieu Guidère voit dans cette vidéo grossière "d'une part, un prétexte de la part des conservateurs américains pour mettre en difficulté Barack Obama sur ses relations avec le monde musulman, avec lequel ils estiment qu'il n'est pas assez ferme et, d'autre part, un prétexte de la part des extrémistes islamistes qui veulent mobiliser les populations sur une thématique qui n'a rien avoir avec les vrais problèmes de leur pays". La correspondante d'Europe1 au Caire a, par ailleurs, recueilli des témoignages place Tahrir qui semblent accréditer que des Egyptiens se servent aussi du film pour sortir dans la rue et régler leur comptes avec les autorités. Un jeune étudiant islamiste a ainsi affirmé au micro d'Europe1 : "au départ, j'étais venu pour protester contre ce film, mais vu comment la police a accueilli notre rassemblement, cela a rapidement dégénéré en un problème entre eux et nous".