Hong Kong s'attend à une nouvelle nuit d'affrontements entre manifestants et la police, lundi. Depuis plusieurs jours, des dizaines de milliers de personnes se sont installés dans le centre de la ville. A coups de sit-ins et de parapluies, un mouvement de désobéissance civile couve contre ce que les Hongkongais vivent comme une oppression de la part de Pékin. Europe 1 vous explique pourquoi la révolte explose après plus de quinze années passées sous l'égide de la Chine.
Tout commence en 1839. Cette protestation a en fait des racines très profondes, qui datent de la domination britannique sur ce territoire insulaire pendant 156 ans. Hong Kong a vécu pendant tout ce temps sur un modèle bien différent du reste de la Chine, influencé notamment par la domination occidentale. En 1997, Londres rend définitivement Hong Kong à la Chine, après des années de préparation à cette rétrocession.
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Les trois parties (la Chine, Hong Kong et la Grande-Bretagne) s'accordent sur le principe de "Un pays, deux systèmes", accordant une large autonomie à la ville-région. Hong Kong n'a donc pas besoin de se plier au régime communiste et vit dans un capitalisme tout ce qu'il y a de plus mondial. Les habitants sont également gouvernés par "des pouvoirs exécutif et législatif et une justice indépendante", peut-on lire dans la Loi fondamentale, la "constitution" de Hong Kong.
Ils veulent plus de libertés. Pourquoi, alors, les Hongkongais se révoltent-ils maintenant contre Pékin, qui n'a pourtant qu'un pouvoir limité sur leur vie politique ? La Loi fondamentale prévoit qu'"à terme", les habitants pourront voter au suffrage universel, un droit qui n'existe pas en Chine. Cela devait s'appliquer en 2012, mais en décembre 2007, Pékin repousse et promet que les Hongkongais pourront voter en 2017. Dans trois ans, donc.
Tout dérape quand le pouvoir central chinois revient sur sa promesse, au mois de juin. Les électeurs n'auront finalement le choix qu'entre trois candidats, avalisés par Pékin, pour les gouverner. Un suffrage universel a minima, donc. Cette décision vient couronner le sentiment de nombreux Hongkongais, qui trouvent que Pékin tente de s'arroger de plus en plus de droits sur la vie locale.
L'annuelle manifestation pro-démocratie du 1er juillet a donc rassemblé encore plus de monde, cette année. Reprenant le nom du mouvement new-yorkais Occupy Wall Street, Occupy Central (Central étant le quartier des affaires de Hong Kong) tente de fédérer les dizaines de milliers de Hongkongais friands de plus de démocratie. Occupy Central a organisé un "référendum officieux", fin juin. Plus de 10% de la population a participé pour réclamer de vraies élections en 2017.
Dérapage et parapluies. Pékin a réagi violemment dimanche à l'intensification de l'occupation des quartiers financiers, après la décision définitive du Parlement chinois, fin août, sur les élections de Hong Kong. Une bonne partie des dizaines de milliers de manifestants s'est fait surprendre par les gaz lacrymogènes dispersés par la police. Un peu démunis, ils se sont protégés instinctivement avec leur parapluie. Il n'en fallait pas plus pour que l'expression "Révolution des parapluies" fasse florès lundi sur les réseaux sociaux.
Le régime communiste est maintenant astreint à un numéro d'équilibriste, estime Jean-François Huchet dans L'Express, entre le respect des règles de droit et la démonstration de force, pour éviter que ce sursaut démocratique n'agace le reste de la population chinoise. Voire lui donne des idées.