Depuis quelques jours, c'est une voix singulière dans le concert diplomatique international. La Chine a en effet une position dissonante par rapport aux autres pays qui déplorent l'arrivée au pouvoir des talibans en Afghanistan. À rebours de puissances comme la France ou les États-Unis, point d'évacuation aérienne des ressortissants ou de rupture diplomatique avec les nouveaux dirigeants et leurs milices : Pékin veut entretenir des relations amicales avec le nouveau pouvoir en place à Kaboul et dans ce pays de plus de 30 millions d'habitants.
La Chine espère en premier lieu une certaine stabilité à sa frontière avec l'Afghanistan. Il veut aussi sécuriser ses investissements dans le pays. Cette alliance de circonstance semble parfaitement contre nature, mais la Chine profite du départ américain pour avancer ses pions. Elle n'a d'ailleurs pas fermé son ambassade à Kaboul et tout cela d'ailleurs avait été anticipé par le gouvernement chinois.
La question ouïghoure est centrale
On se souvient de cette rencontre étonnante, le 28 juillet dernier, en Chine, entre le mollah Abdul Ghani Baradar, numéro deux des talibans, et Wang Yi, le ministre chinois des Affaires étrangères. L'accord entre eux était clair : la Chine soutient le régime taliban, mais elle exige en retour qu'ils coupent les ponts avec le Mouvement islamiste du Turkestan oriental, une organisation séparatiste ouïghoure qui a revendiqué plusieurs attentats en Chine. Sur ce point, Pékin aurait obtenu des garanties.
En échange, les talibans veulent que la Chine investisse davantage dans le pays. "Les talibans veulent de bonnes relations avec la Chine, que nous participions à la reconstruction et au développement de l'Afghanistan. La Chine a toujours respecté l'indépendance de l'Afghanistan, alors nous ne sommes jamais intervenus", affirme Hua Chunying, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.
Un sous-sol gorgé de richesses
Et la Chine a déjà des projets d'investissement en Afghanistan : elle proposerait déjà de construire des routes dans les zones sous contrôle des talibans ainsi qu'un certain nombre de projets énergétiques. La Chine voudrait surtout relancer ses projets miniers en demandant aux talibans d'assurer la sécurité. C'est le cas de la mine de cuivre de Meïssa Unac, au Sud-Est de Kaboul. En 2007, la Chine avait payé trois milliards et demi de dollars une concession de 30 ans pour exploiter la zone, mais elle n'avait pas pu le faire à cause de l'insécurité.
D'autres exploitations pourraient voir le jour, car le sous-sol afghan recèle de minerais et de terres rares. En 2010, un rapport américain estimait leur valeur à près de 1.000 milliards de dollars, de quoi aiguiser bien des appétits.