Les pompiers en Algérie continuent jeudi de lutter contre 24 feux de forêt dans dans le nord et l'extrême est du pays, au milieu de "scènes de désolation", au lendemain de violents incendies qui y ont fait au moins 38 morts dont plus d'une dizaine d'enfants. Le bilan s'est alourdi avec 30 morts parmi lesquels 11 enfants et six femmes à El Tarf, dans l'extrême est du pays, près de la frontière avec la Tunisie, cinq à Souk Ahras, deux femmes à Sétif et une personne à Guelma, dans l'est, selon la protection civile et des médias locaux qui ont aussi fait état de plus de 200 blessés parmi lesquels dix pompiers.
1.700 pompiers ont été mobilisés
Le ministère de la Justice a ouvert une enquête visant à déterminer si les incendies étaient d'origine criminelle après des déclarations du ministre de l'Intérieur selon lesquelles "certains des incendies ont été provoqués". Selon la protection civile, 24 feux sont encore en cours dans sept préfectures. Durant les dernières 24 heures, 1.700 pompiers ont été mobilisés pour éteindre 118 foyers à travers 21 préfectures. L'armée et la protection civile utilisent aussi des hélicoptères bombardiers d'eau.
Tous les ans, le nord de l'Algérie est touché par des feux de forêt, mais ce phénomène s'accentue d'année en année sous l'effet du changement climatique, qui augmente la probabilité des canicules et des sécheresses et par ricochet des incendies. Il faisait environ 48 degrés mercredi à El Tarf, Guelma et Souk Ahras.
De multiples dégâts dans une ville de 100.000 habitants
Sur la route vers El Kala, près d'El Tarf, une ville de 100.000 habitants, une équipe de l'AFP a vu des arbres calcinés, des véhicules brûlés, des gens aux yeux hagards. A El Kala, ils ont constaté "d'importants dégâts dans le parc animalier, la mort d'une personne qui aidait les gens à fuir" et de "12 autres prises au piège dans un autocar" devant ce zoo. A l'hôpital d'El Kala, sur "72 personnes prises en charge, neuf sont en réanimation, neuf sont mortes et les autres sont reparties", a déclaré à l'AFP un cadre du secteur de la santé de la wilaya d'El Tarf.
Le Premier ministre, Aymen Benabderrahmane, arrivé jeudi à El Tarf, a présenté les condoléances du président Abdelmadjid Tebboune aux familles et assuré que les "autorités mettaient en oeuvre tous les moyens" pour soigner les blessés et éteindre les feux encore en cours. Près de Souk Ahras, à environ 200 km de là, cinq incendies ne sont toujours pas maîtrisés. La veille, le feu avait provoqué des scènes de panique en se rapprochant de cette ville d'un demi-million d'habitants. Au moins 350 familles ont quitté leur logement, un hôpital évacué.
Un avion bombardier d'eau en panne
Pour intervenir sur les incendies, les autorités ont mobilisé un bombardier d'eau russe Beriev BE 200, qui est tombé en panne et ne sera pas opérationnel avant samedi, selon le ministre de l'Intérieur, Kamel Beldjoud, mercredi soir. L'Algérie a récemment annulé un contrat pour l'affrètement de sept bombardiers d'eau à une société espagnole, à la suite d'une brouille avec Madrid après son revirement en faveur de la position marocaine sur le dossier du Sahara occidental.
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Les incendies des derniers jours ont ravivé le débat sur le manque de bombardiers d'eau en nombre suffisant, qui avait déjà agité le pays l'an passé quand au moins 90 personnes avaient péri dans le nord du pays, dans les pires incendies depuis l'indépendance.
Un nouveau dispositif de lutte avait été recommandé
Lors d'un séminaire algéro-canadien sur la lutte contre les feux de forêt, des spécialistes avaient recommandé en mai dernier "la mise en place d'un dispositif national de lutte au moins équivalent à celui qui existait dans les années 1980", a indiqué à l'AFP sous couvert d'anonymat un expert qui participait aux débats.
A l'époque, "la DTA (direction du travail aérien) disposait de 22 appareils de type Grumman qui faisaient la fierté de l'Algérie notamment en matière de lutte contre les feux de forêt", a ajouté l'expert, selon lequel les appareils "ont été vendus au dinar symbolique sans qu'aucune solution de rechange ne soit proposée". Pays le plus étendu d'Afrique, l'Algérie compte une surface de zones forestières limitée de 4,1 millions d'hectares, avec un maigre taux de reboisement de 1,76%.