Après la chute de Bachar al-Assad, y a-t-il un risque de morcèlement de la Syrie ?
Trois jours après la chute du pouvoir de Bachar al-Assad lors d'une offensive fulgurante d'une coalition de rebelles, le pays, désormais dirigé par le groupe islamiste HTS, est-il prêt à s'unir autour d'un même projet politique ?
Après plus de 50 ans au pouvoir, le régime du clan Assad est tombé en à peine douze jours. Si la chute du régime fait naître l’espoir d’un certain retour à la stabilité, après 13 ans de guerre civile, l’arrivée au pouvoir des rebelles menés par le groupe islamiste HTS est aussi source d’inquiétudes. La transition en cours en Syrie tourne autour d’une question centrale : le pays sera-t-il capable de faire nation, de s’unir autour d’un même projet politique ?
Un syndrome libyen
La réponse est pour l'instant très incertaine alors qu’il faut voir le pays comme une mosaïque de communautés, de religions avec les forces kurdes au nord-est, les druzes au sud, les chrétiens, les arabes sunnites au centre mais aussi la communauté alaouite proche du chiisme dont est issu le clan Assad.
Avant sa chute, le régime ne contrôlait d’ailleurs qu’à peine 70% du territoire. Spécialiste du Moyen-Orient, le chercheur David Rigoulet-Roze évoque un syndrome libyen pour décrire la situation en Syrie. "Tout l'enjeu d'une future gouvernance sera de pouvoir faire coexister l'ensemble de ces communautés. Le risque est la réinstauration d'une forme de tutelle, d'une hégémonie d'une communauté sur les autres", explique-t-il, au micro d'Europe 1.
Des ingérences étrangères
Et aux enjeux communautaires nationaux s’ajoutent aussi les ingérences étrangères, en particulier celles de la Turquie, soutien de certains groupes rebelles. "L'agenda ne coïncide pas forcément avec un agenda national tel qu'affiché par HTS notamment vis-à-vis des Kurdes. Il risque d'y avoir des tensions rapidement avec des contradictions internes qui vont se manifester du fait de ces ingérences externes", poursuit-il.
Face aux inquiétudes, le nouvel homme fort de la Syrie, Abou Mohammed al-Joulani, assure de son côté être prêt à discuter avec toutes les communautés.