Les Kurdes, éternels oubliés de l'Histoire, en sont également les victimes. Ce sont les conclusions d’un rapport accablant publié mardi par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies*. Il dénonce les crimes terribles commis en Syrie, dans les zones kurdes occupées par l’armée turque.
Cette enquête implacable, menée sur le terrain pendant presque six mois, a permis de recueillir des témoignages terrifiants. Ce sont des récits tout simplement glaçants de survivants qui racontent de manière très clinique les tortures infligées par les milices supplétives de l’armée turque aux civils kurdes. Ces derniers ont été arrêtés de manière massive et parfaitement arbitraire dans les régions du nord de la Syrie, occupées après les offensives de 2018, puis de 2019.
Viols collectifs, expropriations…
On y lit la douleur, l’isolement, la faim, la soif et une persécution du quotidien, sans règles et sans limites, jusqu’à la folie ou la mort. Surtout, on perçoit une volonté d’humilier et de briser toute résistance. C’est ce qui ressort de façon extrêmement frappante de ces dizaines de témoignages exceptionnels, car les régions d'Afrin et de Raïs al-Aïn sont pratiquement inaccessibles depuis qu'elles sont passées sous contrôle turc.
En lisant ce document, on découvre que des miliciens entraînés et encadrés par des militaires d’un pays membre de l’OTAN, qui réclame son adhésion à l’Union européenne, se comportent comme de vulgaires djihadistes. Le recours au viol est systématique, avec des viols collectifs de femmes, souvent devant leurs maris et leurs enfants, devant leurs familles et leurs voisins. Il s'agit d'une arme de guerre.
Un véritable nettoyage ethnique
Les pillages, les expropriations, les confiscations des biens, des fermes, des maisons et des champs figurent également dans la panoplie des milices pour imposer leur loi aux Kurdes. Tout cela vise à instaurer une terreur pour imposer le départ et la fuite des populations kurdes de ces zones frontalières de la Turquie.
Il faut bien appeler un chat un chat : c'est la définition d’un nettoyage ethnique. Le rapport estime que l'implication de la Turquie est "totale", d'abord parce que le pays d'Erdogan est juridiquement responsable du traitement des civils dans ces zones dont elle est la puissance militaire occupante, selon les règles de la Convention de Genève. Ensuite, parce que des fonctionnaires turcs sont impliqués dans ces crimes de guerre de façon très directe, ce qui les rend passibles de poursuites devant les instances de la justice internationale.
*Ce rapport de 25 pages des Nations unies est à retrouver ici, en anglais.