Un nouveau Premier ministre haïtien, Alix Didier Fils-Aimé, a prêté serment lundi et promis de "rétablir la sécurité" dans ce pays des Caraïbes frappé par la violence de gangs, au lendemain du limogeage de son prédécesseur par le Conseil présidentiel de transition.
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Le pays sans président depuis 2021
Signe de la crise multidimensionnelle à laquelle Haïti fait face, un avion de la compagnie américaine Spirit Airlines à destination de la capitale Port-au-Prince a été touché lundi par des tirs d'arme à feu et dérouté vers la Républicaine dominicaine voisine. Après seulement cinq mois de pouvoir, le Premier ministre sortant Garry Conille a été remplacé, contre sa volonté et après un conflit avec le Conseil de transition, par l'homme d'affaires Alix Didier Fils-Aimé, qui s'est exprimé lundi direct à la télévision haïtienne.
Le nouveau chef du gouvernement s'est engagé dans un discours d'investiture en français à "travailler sans relâche (...) à la cohésion" politique et au "rétablissement de la sécurité" dans le pays. "Je prends l'engagement (...) de mettre mon énergie, mes compétences et mon patriotisme au service de la cause nationale", a déclaré Alix Didier Fils-Aimé, qui a également évoqué de prochaines "élections", alors que le pays est privé de président depuis 2021. Son prédécesseur Garry Conille avait été nommé début juin pour tenter de stabiliser le pays.
La décision de le démettre de ses fonctions est survenue dimanche, alors que le Conseil de transition souhaitait changer des responsables de plusieurs ministères contre l'avis du Premier ministre sortant. Garry Conille avait dénoncé dimanche une décision à son encontre "entachée d'illégalité". Haïti pâtit depuis des dizaines d'années d'une instabilité politique chronique. Mais depuis quelques mois, ce pays des Caraïbes doit faire face à une nouvelle résurgence de la violence des gangs, qui contrôlent 80% de la capitale Port-au-Prince.
Ces groupes armés, accusés de nombreux meurtres, viols, pillages et enlèvements contre rançon, ont décidé en début d'année d'unir leurs forces pour renverser le Premier ministre Ariel Henry. Après sa démission en avril, le Conseil présidentiel de transition de neuf membres avait été mis en place pour exercer le pouvoir exécutif, avec pour lourde mission de rétablir la sécurité et d'organiser des élections - les dernières remontent à 2016. La situation n'a cessé de s'aggraver depuis, malgré la mise en place de la mission multinationale de soutien à la police.
Soutenue par l'ONU et les Etats-Unis, cette mission menée par le Kenya a commencé à se déployer cet été avec pour l'instant un peu plus de 400 hommes. Lundi, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé les acteurs politiques haïtiens à "surmonter leurs divergences" et à "travailler ensemble", selon son porte-parole. Selon la mission de l'ONU en Haïti (Binuh), 1.233 meurtres ont encore été commis entre juillet et septembre, dont 45% imputables aux forces de l'ordre et 47% aux gangs, dans ce pays de 12 millions d'habitants.
Des actes particulièrement violents visent parfois des enfants, avec des victimes mutilées avec des machettes, lapidées, décapitées, brûlées vives ou enterrées vivantes. Des conditions qui ont forcé plus de 700.000 personnes, pour moitié des enfants, à fuir leur domicile pour trouver refuge ailleurs dans le pays, selon les derniers chiffres de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
Signe de l'insécurité, un vol de la compagnie Spirit Airlines parti de Floride a été détourné lundi vers Santiago en République dominicaine, où une inspection "a révélé des preuves de dégâts sur l'appareil compatibles avec des tirs d'arme à feu", selon le transporteur américain à bas coût, qui a fait état de "blessures légères" d'un membre d'équipage. Ses liaisons avec Haïti sont suspendues, comme celles d'American Airlines.