Le menu du sommet européen, qui se tient jeudi et vendredi à Bruxelles, était déjà dense entre le plan de relance, la politique migratoire, les relations avec la Turquie et la Russie. Mais un autre dossier de taille s'est ajouté in extremis à l'ordre du jour : la loi hongroise contre l'homosexualité.
Les associations redoutent une censure
Le texte de la loi indique clairement que la pornographie, au même titre que les contenus qui font la promotion du changement de sexe ou de l'homosexualité, doivent être interdits aux mineurs. Mais quels contenus seront concernés ? C'est toute l'ambiguïté de cette loi très vague et donc sujet à interprétations.
Les ONG redoutent par exemple l'interdiction de certaines publicités. En 2019, des affiches de Coca-Cola montrant un couple d'hommes avaient déjà suscités des appels au boycott. Cette censure pourrait aussi s'appliquer aux livres, aux films ou aux séries, comme Friends ou Billy Eliott, car l'homosexualité est un des sujets abordés. Le texte précise également que désormais les cours d'éducation sexuelle seront assurés par des organisations agrées par l'Etat.
"Ils n'ont plus rien à faire dans l'Union européenne"
Cette loi a été qualifiée de "honte" par la présidente de la commission, Ursula von der Leyen. Le Premier ministre hongrois Viktor Orban a été sommé de s'expliquer lors du dîner de jeudi soir. A son arrivée, il semblait très serein et sûr de son bon droit. "Sous le régime communiste, je me battais pour la liberté. L'homosexualité était interdite, alors je me suis battu pour leurs droits. Je les défends, mais cette loi-là n'a rien à voir. Elle porte sur les droits des enfants et des parents", a-t-il déclaré.
Mais il en faudra plus pour convaincre une bonne partie de ses collègues. Les pays du Bénélux sont en pointe dans ce combat : le Premier ministre belge Alexander De Croo est arrivé avec le drapeau arc-en-ciel épinglé sur son veston et le Néerlandais Mark Rutte l'a fait hisser sur son ambassade. "Pour moi, ils n'ont plus rien à faire dans l'Union européenne. Hélas, dans notre système, personne ne peut les forcer à partir. Il faut agir étape par étape et espérer entre temps qu'ils vont revenir en arrière", a-t-il lancé, particulièrement remonté.
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"Il nous faut avoir une discussion entre Etats membres"
La Commission européenne est effectivement prête à lancer la première étape de la procédure d'infraction. En parallèle, 17 chefs d'Etat et de gouvernement, dont Emmanuel Macron, ont signé une lettre commune pour s'engager à continuer à lutter contre les discriminations envers les LGBT. "Il nous faut avoir une discussion entre Etats membres. Elle sera franche, elle sera ferme. J'espère que dans ce dialogue, on trouvera aussi un chemin qui lui permettra de porter ce que sont ses priorités, mais en respectant pleinement nos valeurs et donc de porter lui-même un changement de ce texte", a déclaré le Président de la République, qui espère que Viktor Orban reculera de lui-même. Mais dans la salle, Viktor Orban aura des alliés vendredi, avec au premier rang le premier ministre de la Pologne Mateusz Morawiecki.
En Hongrie, les associations estime que ce flou législatif entretient aussi le risque d'un effet dissuasif chez les organisateurs d'événements publics. "Comment s'assurer qu'un enfant ne passera pas dans les rues lors d'une Gay Pride ?", s’interroge l'un d'eux dans la presse hongroise. Mais Viktor Orban se défend : "Cette loi ne concerne pas l'homosexualité mais la façon dont un enfant apprend l'homosexualité."