Malgré une avalanche de départs au sein de son gouvernement, le Premier ministre britannique Boris Johnson a rejeté mercredi les appels à la démission venant y compris de ses fidèles, malgré la crise sans précédent dans laquelle l'ont plongé les scandales à répétition. Loin du triomphe de ses débuts à Downing Street en 2019 sous la promesse de réaliser le Brexit, le chef du gouvernement conservateur a affronté mercredi la journée la plus difficile de son mandat, cerné par les affaires embarrassantes et leur flot d'accusations de mensonges.
Plusieurs ministres de premier plan, fidèles y compris, lui ont demandé de démissionner tant la situation est devenue intenable, selon les médias britanniques. Parmi les noms cités, la ministre de l'Intérieur, Priti Patel, ou Nadhim Zahawi, moins de 24 heures après sa nomination comme ministre des Finances.
Mais comme il l'avait déjà fait plus tôt dans la journée face aux députés, il a rétorqué qu'il voulait rester pour se consacrer "aux problèmes extrêmement importants" auxquels le pays est confronté, selon la presse. "Nous allons continuer avec le gouvernement de ce pays", a affirmé Boris Johnson dans l'après-midi face aux chefs des commissions parlementaires, quelques instants après avoir affirmé qu'il passait une semaine "formidable".
Près de 40 départs en fin de journée
Sans crier gare, les ministres de la Santé Sajid Javid et des Finances Rishi Sunak ont claqué la porte mardi soir, déclenchant l'hémorragie. D'autres membres du gouvernement, de rang moins élevé, ont à leur tour jeté l'éponge les uns après les autres. En fin de journée, le nombre de départs est proche des 40. Boris Johnson est resté combatif. Il a jugé qu'il ne serait pas "responsable" de quitter le pouvoir dans le contexte actuel, entre crise du pouvoir d'achat et guerre en Ukraine.
Un peu plus tôt, lors de la séance hebdomadaire de questions devant les députés, ponctuée de rires et de moqueries sonores, Boris Johnson a affirmé que le "mandat colossal" qui lui avait été confié par les électeurs en 2019 lui conférait le devoir de "continuer".
Le chef de l'opposition travailliste, Keir Starmer, a fustigé un "spectacle pathétique" de fin de règne, tandis que le leader du parti nationaliste écossais SNP à la chambre des communes, Ian Blackford, a exigé la tenue d'élections anticipées. Une idée que Boris Johnson a rejetée d'un revers de main.
"Bye Boris"
Les ministres démissionnaires ont eu des mots durs pour le chef du gouvernement, mettant en cause son honnêteté. Devant les députés, Sajid Javid a détaillé les raisons de son départ, convaincu que Boris Johnson ne changerait pas : "ça suffit", a-t-il lancé, avant que certains députés ne reprennent un "bye Boris" moqueur lancé par l'un d'eux. La démission de Sajid Javid et celle de son collègue des Finances ont été annoncées mardi soir alors que Boris Johnson venait de présenter des excuses après un nouveau scandale.
Boris Johnson a reconnu avoir fait une "erreur" en nommant en février dans son gouvernement Chris Pincher, "whip" en chef adjoint chargé de la discipline parlementaire des députés conservateurs. Ce dernier a démissionné la semaine dernière après avoir été accusé d'attouchements sur deux hommes. Après avoir affirmé l'inverse, Downing Street a reconnu mardi que le Premier ministre avait été informé dès 2019 d'anciennes accusations à l'encontre de Chris Pincher, mais qu'il les avait "oubliées".
"Intégrité" en question
Pour Sajid Javid, 52 ans, les Britanniques sont en droit d'attendre "de l'intégrité de la part de leur gouvernement". Boris Johnson a rapidement remplacé les deux démissionnaires en nommant son ministre de l'Éducation Nadhim Zahawi aux Finances et Steve Barclay, jusque-là chargé de la coordination gouvernementale, à la Santé. Mais depuis, les départs se sont multipliés. Selon un sondage Savanta ComRes publié mercredi, 72% des Britanniques estiment que le Premier ministre devrait démissionner.
Déjà considérablement affaibli par le scandale des fêtes illégales organisées à Downing Street pendant la pandémie de Covid-19, Boris Johnson a survécu il y a quelques semaines à un vote de défiance de son propre camp.
Mais selon la presse britannique, en coulisses, les anti-Johnson sont à la manœuvre pour permettre un nouveau vote rapidement, en changeant la règle actuelle qui protège le chef du gouvernement pour encore 11 mois. L'élection du bureau exécutif du puissant "Comité 1922", compétent pour trancher la question, doit se tenir lundi.