Vladimir Poutine a demandé à un ancien lieutenant d'Evguéni Prigojine, patron du groupe Wagner tombé en disgrâce aux yeux du président russe et mort dans le crash de son avion fin août, de former des volontaires pour combattre en Ukraine. "Lors de la dernière réunion, nous avons évoqué le fait que vous serez impliqué dans la formation d'unités de volontaires capables de mener à bien diverses missions de combat, principalement, bien sûr, dans la zone de l''opération militaire spéciale'", en Ukraine, a déclaré jeudi Vladimir Poutine à Andreï Trochev, selon un communiqué du Kremlin publié vendredi.
Selon Vladimir Poutine, Andreï Trochev, surnommé "Sedoï" (cheveux gris, en russe), un ancien très proche d'Evguéni Prigojine dans la galaxie Wagner, a l'expérience pour mener à bien une telle mission, trois mois après la tentative avortée de rébellion en Russie du groupe paramilitaire. Colonel à la retraite, il est souvent décrit comme l'un des fondateurs de Wagner et est sous sanctions européennes pour avoir été "directement impliqué dans les opérations militaires du groupe (...) en Syrie", selon un document de l'UE daté de fin 2021. "Vous connaissez les questions qui doivent être résolues à l'avance pour que le travail de combat se déroule de la meilleure façon et avec le plus de succès possible", a de son côté fait valoir le président russe à l'ancien militaire.
Les principales informations :
- Poutine a demandé à un ex-lieutenant de Prigojine de former des volontaires pour combattre en Ukraine
- Zelensky commémore le 82e anniversaire des massacres de Babi Yar
- Orban met en garde l'UE contre l'intégration d'un pays en guerre
Des bonnes relations entretenues
Le président russe a également salué le fait qu'Andreï Trochev "entreten(ait) des (bonnes) relations avec (ses) compagnons d'armes". La demande de Vladimir Poutine, officialisée en présence de Iounouss-Bek Evkourov, vice-ministre de la Défense, montre encore un peu plus l'intégration des anciens combattants de Wagner au sein de l'armée russe. "(Andreï Trochev) travaille déjà au ministère de la Défense", a même confirmé quelques instants plus tard le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, à l'agence de presse Ria Novosti. Fin juin, à l'issue de la mutinerie avortée de Wagner, le Kremlin avait laissé trois options aux combattants du groupe paramilitaire : intégrer les rangs de l'armée russe, rejoindre la vie civile ou bien s'exiler au Bélarus, allié de Moscou dans son assaut en Ukraine.
Mais le décès de leur chef, Evguéni Prigojine, fin août, dans le crash de son avion entre Moscou et Saint-Pétersbourg, aux côtés de plusieurs membres de sa garde rapprochée, avait acté la fin de Wagner sous sa forme connue jusque-là.
Commémoration du 82ᵉ anniversaire des massacres de Babi Yar
Dans le même temps, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a commémoré vendredi le 82e anniversaire des massacres de Babi Yar, un ravin situé près de Kiev, où les nazis ont exécuté plus de 30.000 Juifs en 1941. Visiblement ému, Volodymyr Zelensky, lui-même de confession juive, vêtu de son habituel treillis militaire vert kaki, a allumé une bougie puis s'est recueilli devant le monument "Menorah" dédié aux Juifs exécutés et ensevelis à l'intérieur de cette immense fosse commune. Il était accompagné de représentants de la communauté juive et de descendants de victimes, selon une vidéo publiée sur sa chaîne Telegram le jour de cette commémoration de ce qui fut le plus grand massacre par balles de Juifs en Ukraine perpétrés par les nazis et leurs collaborateurs locaux.
"Adultes, enfants... Des familles entières... Des femmes, des hommes... Le mal n'a pas fait de distinction entre qui faucher", a-t-il rappelé dans un message. "Quel que soit le nombre d'années écoulées, l'humanité se souviendra des vies fauchées par le nazisme. Et elle se souviendra toujours que ce mal a été puni", a souligné le président ukrainien en promettant "plus jamais ça!". Selon les chiffres officiels, entre 100 et 150.000 personnes - des Juifs, mais aussi des Roms, des prisonniers de guerre soviétiques et des Ukrainiens - ont été passées par les armes à Babi Yar entre 1941 et 1942, durant l'occupation du pays par les nazis.
"Ces crimes odieux sont imprescriptibles. Leurs auteurs doivent être traduits en justice. C'est le seul moyen d'empêcher des génocides similaires aujourd'hui", a de son côté réclamé son Premier ministre, Denys Chmygal, sur Telegram. Le chef de la présidence, Andriï Iermak, a, lui aussi, établi un parallèle avec l'invasion russe du pays, où Kiev accuse Moscou de "crimes de guerre", comme à Boutcha, où des civils ont été tués lors de la retraite des forces russes au printemps 2022, un carnage démenti par Moscou. "Nous devons arrêter les nazis russes modernes qui répètent les pires crimes contre l'humanité", a-t-il lancé sur les réseaux sociaux. L'an passé, Volodymyr Zelensky avait appelé à "punir" les "criminels qui provoquent de telles tragédies", visant "les dictateurs et les tyrans".
Orban met en garde l'UE contre l'intégration d'un pays en guerre
Le Premier ministre hongrois Viktor Orban, réticent à accueillir l'Ukraine au sein de l'Union européenne, a mis Bruxelles en garde vendredi contre l'ouverture de discussions d'adhésion en raison des nombreuses incertitudes liées à l'invasion russe. "Est-il approprié de démarrer des négociations avec un pays en guerre?", a déclaré le dirigeant nationaliste à l'occasion d'une interview radiophonique. "Nous ne connaissons pas les dimensions du territoire du fait de la guerre en cours. Ni la taille de sa population vu le flot de réfugiés", a-t-il souligné. Intégrer l'Ukraine "sans être au fait de ces paramètres serait une décision sans précédent", selon M. Orban, alors que "tout le système de décisions dans l'UE est basé" sur de tels éléments.
La Hongrie entretient des relations tendues avec Kiev : bien que membre de l'Otan, elle refuse de fournir toute contribution militaire et maintient des liens avec le Kremlin. Budapest ne cesse également de souffler sur les braises d'une vieille querelle, relative aux droits de la minorité hongroise de l'ouest de l'Ukraine. Elle compte quelque 100.000 membres, devenus ukrainiens après le démantèlement de l'empire austro-hongrois à l'issue de la Première Guerre mondiale. En juin 2022, l'UE a accordé à l'Ukraine le statut de candidate à l'adhésion, dans un geste hautement symbolique. Pour passer à l'étape suivante, qui consiste à ouvrir des négociations, la Commission européenne a défini sept critères de référence pour Kiev.
Il s'agit de conditions à remplir notamment en matière de lutte contre la corruption généralisée et de réformes judiciaires. Dans une évaluation intermédiaire en juin, Bruxelles a estimé que deux critères étaient remplis et que les cinq autres étaient "à un certain niveau de progrès". L'exécutif européen doit rendre un rapport fin octobre sur l'état des progrès et se prononcer sur l'ouverture ou non de négociations d'adhésion, avant que les 27 ne se saisissent de la question lors d'un sommet mi-décembre. Ces négociations peuvent prendre du temps avant de déboucher sur une adhésion.