En Chine, la grogne ne faiblit pas. Depuis un mois, le peuple est dans la rue pour dénoncer les mesures sanitaires jugées trop restrictives. On se souvient notamment des images folles des milliers de visiteurs de Disneyland enfermés dans le parc d'attractions de 390 hectares à Hong Kong, après la détection d'un cas positif au coronavirus fin octobre. La démonstration de la politique "zéro Covid". Mais après trois ans de crise sanitaire, le verre est plein pour les Chinois.
"À bas le Parti communiste !" et "À bas Xi Jinping" résonnent désormais dans les foules. Un cap franchi dans la mobilisation : les Chinois demandent désormais la démission de leur président. Un point de bascule qui pourrait faire vaciller le pouvoir pékinois ? "Non", répond le sinologue Alain Wang. "Le gouvernement reprend la main, on est loin d'une destitution", estime-t-il auprès d'Europe 1. "Le régime a laissé faire pour voir l'étendue de la force de l'opposition et du peuple et mener par la suite des arrestations massives."
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Et pour étouffer la mobilisation, le pouvoir a effacé toutes les images sur la toile. "Tout a disparu", poursuit l'enseignant à l’École Centrale Supélec et à l’Institut français de la mode (IFM). "Le pouvoir veut faire taire l'opposition. Après ce week-end, les manifestants sont moins nombreux car les gens se cachent, ils ont peur. Les jeunes, eux, devraient certainement poursuivre la mobilisation les soirs, à Shanghai, Pékin et au Canton (ville portuaire au nord-est de Hong Kong, ndlr)."
La mort de Jiang Zemin, un frein pour le peuple ?
Et la situation pourrait rapidement évoluer. Ce mercredi 30 novembre marque un nouveau tournant pour la Chine. Jiang Zemin, président de la République populaire de 1993 à 2003 est mort à l'âge de 96 ans. Une disparition qui renvoie à une date-clé de la répression en Chine : le 4 juin 1989. L'homme était arrivé au pouvoir au lendemain de la répression des manifestations de la place Tiananmen de Pékin et avait accompagné la transformation de la nation la plus peuplée du monde en une puissance mondiale. Une sombre journée de massacre : le gouvernement évoquait la mort de 200 civils - l'ambassadeur britannique en Chine de l'époque, Sir Alan Donald, annonçait 10.000 personnes.
La mort de Jiang Zemin pourrait enclencher une période de deuil en Chine. "Une opportunité", pour le pouvoir en place, de calmer la gronde en imposant de nouvelles mesures. "S'il n'était pas très apprécié, Jiang Zemin avait adopté une économie libérale a contrario de Xi Jinping, qui œuvre pour une réétatisation de la Chine", examine le sinologue.
Le maintien de la politique "zéro Covid"
Xi Jinping a pris le pouvoir en 2013. L'homme a pour volonté d'ouvrir une nouvelle ère pour la Chine et tient d'une main de fer la nation qui compte 1,5 milliard d'habitants... au prix des droits humains. Après ce dernier week-end de contestations, Pékin a assouplit sa politique en matière de coronavirus. A Urumqi, capitale de la province du Xinjiang au nord-ouest du pays, la population pouvait à nouveau se déplacer en bus mardi pour faire ses courses, après des semaines de confinement. Toutefois, le Parti communiste chinois gouvernement devrait garder le cap. "La politique 'zéro Covid' va rester", estime Alain Wang. "Ils ne vont pas lâcher, à l'image de cette grande campagne de rappel de vaccination pour les seniors."
Pendant ce temps-là, la communauté internationale se mobilise. Human Rights Watch a appelé ce vendredi le gouvernement chinois à "libérer tous les manifestants détenus à tort et mettre fin à la censure en ligne des informations relatives aux manifestations".