La NSA a cessé de surveiller les téléphones américains. Depuis lundi minuit, le programme de surveillance à grande échelle n'est plus en vigueur. La National security agency (NSA) n'a donc plus le droit de surveiller la totalité des appels téléphoniques passés vers ou depuis les Etats-Unis. "A partir de ce [dimanche] soir, les employés de la NSA qui consultaient la base de données ne pourront plus le faire", a déploré le président de la commission du renseignement du Sénat, Richard Burr. Europe 1 vous explique les raisons de cette suspension.
Tout commence avec les attentats du 11-Septembre. Quelques semaines après l'effondrement des tours jumelles, George W. Bush, alors président des Etats-Unis, fait adopter le Patriot Act, un ensemble de mesures qui ont pour vocation de renforcer la sécurité et le rôle du renseignement dans le pays. Un de ses volets renforce considérablement la NSA et lui permet, entre autres, de collecter les métadonnées des appels téléphoniques. Pour faire simple, le renseignement américain a le droit d'enregistrer les numéros de téléphone, la localisation des lignes ou encore la durée des appels, sans pouvoir garder leur contenu.
Longtemps resté secret, ce programme d'écoutes à grande échelle a été révélé par Edward Snowden, un ancien employé de la CIA qui a dévoilé en 2013 des documents à des journalistes du quotidien britannique The Guardian.
La section 215 du Patriot Act, qui prévoit les surveillances téléphoniques sur le territoire américain, avait une durée de vie limitée (déjà repoussée par Barack Obama). Le 1er juin 2015, ce volet du programme a pris fin. La Maison Blanche avait prévu que tous les serveurs de la NSA collectant les métadonnées cesseraient de fonctionner à 00h01, heure locale.
Le remplaçant attendra. Pourtant, Barack Obama a prévu un remplaçant au Patriot Act. Appelé le USA Freedom Act, il est plus ciblé que son prédécesseur. Il est notamment prévu de déléguer l'enregistrement des données aux opérateurs de télécommunications (l'équivalent américain de SFR, Orange ou encore Bouygues Telecom). Jusqu'aux révélations d'Edward Snowden, la NSA captait ces informations sans prévenir officiellement les entreprises. La nouvelle mouture du programme de renseignement prévoit également un renforcement du contrôle judiciaire de l'exploitation des données collectées.
Mais en raison d'un imbroglio législatif, le texte n'a pas encore été voté. "Je pense que les terroristes surveillent très attentivement ce qui se passe aux Etats-Unis", a averti John Brennan, directeur de la CIA. "On ne peut pas se permettre" de baisser la voilure sur la surveillance, a-t-il ajouté, sous-entendant que la fin de la section 215 mettait en danger la sécurité du territoire. Pourtant, une commission formée par Barack Obama en 2013 a conclu que cette collecte n'a jamais été décisive pour empêcher le moindre attentat. D'autres responsables de la sécurité ont plaidé que le programme fourni des informations importantes qui, combinées à d'autres renseignements, permettent de déjouer des attaques. Pour de nombreux experts de la sécurité, la suspension de ces écoutes n'aura pas de conséquences immédiates. D'ici quelques jours, les parlementaires américains devraient voter le Freedom Act.
Un homme à l'origine de la suspension. Le blocage de la nouvelle loi est en effet relativement limité à la volonté d'un homme : Rand Paul. Sénateur républicain, il a réussi à bloquer à plusieurs reprises les efforts de parlementaires de son parti contre l'adoption du Freedom Act. Rand Paul, qui se présente à l'investiture républicaine pour l'élection présidentielle de 2016, est un libertarien, opposé à toute forme d'intervention de l'Etat dans la vie privée de ses citoyens. Avec son opposition, il s'est attiré la colère de son propre camp, notamment celle de Richard Burr.
Rand Paul lui-même a reconnu ne pas pouvoir retarder davantage l'adoption de la loi : elle "sera adoptée au bout du compte", a-t-il admis. Le Sénat va donc continuer cette semaine à examiner le "nouveau Patriot Act" et devrait voter son adoption dans la foulée, rétablissant l'autorisation à une large surveillance des appels des Américains.