La Suède accuse l'Iran d'une cyberattaque en 2023 visant à «venger» les autodafés du Coran

Suède
© Michael Campanella / GETTY IMAGES EUROPE / Getty Images via AFP
  • Copié
avec AFP / Crédit photo : Michael Campanella / GETTY IMAGES EUROPE / Getty Images via AFP , modifié à
Selon une enquête préliminaire menée par les autorités suédoises, les services de renseignements iraniens auraient piraté en 2023, un opérateur de SMS du pays nordique afin d'envoyer des messages appelant à se "venger" des profanateurs du Coran.

Les autorités suédoises ont accusé mardi les services de renseignement iraniens d'avoir piraté en 2023 un opérateur de SMS pour envoyer des messages encourageant les gens à se "venger" des profanateurs du Coran. Quelque 15.000 messages "appelant à la vengeance contre les auteurs d'autodafé du Coran" avaient été envoyés à l'été 2023, en écho à une vague de profanation du livre saint de l'Islam en Suède, selon un communiqué du ministère public.

L'Iran rejette ces accusations "sans fondement"

"L'enquête préliminaire montre que c'est l'État iranien, par l'intermédiaire du Corps des gardiens de la révolution islamique iranienne (CGRI), qui a piraté les données d'une société suédoise exploitant un important service de SMS", a indiqué dans le communiqué le procureur Mats Ljungqvist. Il s'agissait de "créer des divisions dans la société suédoise", a-t-il fait valoir. Début août 2023, les médias suédois avaient rapporté qu'un grand nombre de personnes en Suède avaient reçu des messages de la part d'un groupe se faisant appeler "Anzu Team" exhortant à la vengeance contre les profanateurs du Coran.

"L'enquête nous a permis d'établir l'identité des pirates iraniens qui ont perpétré cette grave atteinte à la protection des données", a ajouté M. Ljungqvist. L'enquête est toutefois désormais close faute de pouvoir inculper les services iraniens. L'Iran a rejeté mardi ces accusations, les jugeant "sans fondement", a rapporté l'agence de presse Tasnim. L'ambassade de la République islamique d'Iran à Stockholm "estime que ces affirmations et leur publication dans les médias empoisonnent (...) les relations entre les deux pays", a ajouté l'agence.

Le gouvernement suédois s'est de son côté alarmé de la possible implication de l'Iran dans une telle opération. "Il est très grave qu'un acteur étatique - en l'occurrence l'Iran - puisse être lié à une opération visant à déstabiliser ou à accroître les divisions en Suède", a déclaré le ministre de la Justice Gunnar Strömmer dans un message à l'AFP. Il a refusé de dire comment le gouvernement a agi contre l'Iran après avoir été informé de ces événements mais a mentionné qu'une réouverture de l'enquête était toujours possible. Les services de renseignement suédois (Säpo) ont estimé de leur côté qu'avec cette opération "l'objectif était, entre autres, de présenter la Suède comme un pays islamophobe", selon Fredrik Hallström, chef des opérations cité dans un communiqué de Säpo.

Échange de prisonniers

Les relations entre la Suède et plusieurs pays du Proche-Orient se sont détériorées à l'été 2023 quand des manifestations ont éclaté dans ces pays contre plusieurs autodafés menés dans le pays nordique, notamment à l'initiative de Salwan Momika, un réfugié irakien. Le gouvernement suédois avait alors condamné les autodafés du livre sacré sur son sol, tout en soulignant la prédominance de la liberté d'expression et de rassemblement. L'ambassade de Suède en Irak a ainsi été prise d'assaut à deux reprises pendant l'été 2023, avec des débuts d'incendie dans son enceinte lors de la deuxième attaque. Après ces attaques, les services de renseignement avaient relevé le niveau d'alerte terroriste à quatre sur une échelle de cinq en août 2023, jugeant que la Suède était devenue une "cible prioritaire" en raison des autodafés. 

Par ailleurs, la Suède et l'Iran entretiennent des relations tendues depuis plusieurs années, en particulier depuis l'arrestation en 2019 en Suède d'un Iranien, Hamid Noury, et sa condamnation à la perpétuité pour son rôle dans des exécutions de masse d'opposants ordonnées par Téhéran en 1988. Il a été remis à l'Iran en juin 2024 en échange de de deux Suédois, dont un diplomate de l'Union européenne, qui étaient détenus en Iran. Les deux Suédois libérés sont Johan Floderus - le diplomate détenu depuis avril 2022 - et Saeed Azizi - arrêté en novembre 2023. Les services de renseignement suédois ont par ailleurs accusé en mai l'Iran de recourir à des gangs criminels pour commettre en Suède des actes de violence contre des intérêts d'Israël et d'autres Etats.