Le pape François a proclamé "saints" dimanche dix figures de l'Eglise catholique, dont l'ermite du désert Charles de Foucauld, devant quelque 45.000 fidèles du monde entier réunis sur la place Saint-Pierre à Rome. Parmi ces dix "canonisés" figurent les religieux français Marie Rivier (1768-1838) et César de Bus (1544-1607) ainsi que le prêtre et journaliste néerlandais Titus Brandsma, connu pour son engagement contre la propagande nazie durant la Seconde Guerre mondiale et tué à Dachau en 1942.
Arrivé en voiture, le pape François, 85 ans, qui souffre de douleurs au genou, n'est pas apparu en fauteuil roulant pour présider cette messe de canonisation - la première depuis la pandémie - aux côtés d'une cinquantaine de cardinaux et de 2.000 prêtres et évêques. Tôt dimanche, par un temps estival, des groupes de pèlerins - dont beaucoup venus de France, des Pays-Bas, d'Afrique et d'Amérique latine - avaient commencé à affluer devant la plus grande basilique du monde, sur lequel étaient accrochés des portraits des nouveaux "saints". Certains pèlerins portaient eux-mêmes un vêtement à leur effigie.
"Notre fils s'appelle Foucauld, c'est une grande joie de venir en famille pour la canonisation de son saint patron. Ca ne se passera qu'une fois dans sa vie, alors nous sommes tous venus", a confié Marie, sa mère, 30 ans, venue de Bourg-en-Bresse. "Depuis deux ans, nous avons vécu beaucoup de choses en local, dans nos petites paroisses, dans nos diocèses, en distanciel, et enfin (...) nous pouvons nous retrouver ensemble autour du Saint-Père", s'est réjoui auprès de l'AFP Mgr Luc Ravel, archevêque de Strasbourg.
Cette canonisation "donne une ampleur universelle à Saint Charles de Foucauld, c'est rejoindre au fond ce qu'il a toujours voulu être et ce que le pape François nous dit à la fin de son encyclique 'Fratelli tutti' (tous frères)", a-t-il ajouté, en référence au surnom de l'ermite du désert, le "frère universel".
"Grande émotion"
"Alors que malheureusement les distances, les tensions et les guerres augmentent dans le monde, que ces nouveaux saints inspirent des voies de dialogue, surtout le coeur et l'esprit de ceux qui occupent des postes à responsabilité, et sont appelés à être des protagonistes de la paix et non de la guerre", a déclaré le pape à la fin de la messe.
La canonisation - étape finale vers la "sainteté" dans l'Eglise catholique, succédant à la béatification - requiert trois conditions : être mort depuis cinq ans au moins, avoir mené une vie chrétienne exemplaire et avoir accompli au moins deux miracles. Le procès en béatification de Charles de Foucauld, mort assassiné en 1916 à Tamanrasset, dans le Sud désertique algérien, avait commencé dans les années 1930. Il avait été déclaré "bienheureux" en 2005 par le pape Benoît XVI.
Après la guérison d'un cancer en 1984, un deuxième miracle lui a été attribué par le Vatican: l'histoire insolite d'un jeune charpentier de Saumur (centre de la France), qui survit en 2016 à une chute de 15 mètres sur un banc, malgré un abdomen transpercé. Le martyr Devasahayam (Lazare) Pillai (1712-1752), un hindou converti au christianisme, est quant à lui le premier laïc indien à devenir "saint". Arrêté, il est torturé pendant trois ans puis exécuté, ayant refusé d'abjurer sa foi.
Les cinq autres canonisés sont les prêtres italiens Luigi Maria Palazzolo et Giustino Maria Russolillo, les religieuses italiennes Maria Domenica Mantovani et Maria di Gesù Santocanale et l'italo-uruguayenne Maria Francesca Rubatto, qui devient la première sainte de l'Uruguay. Nancy Gómez, Colombienne de 46 ans, a dit ressentir une "grande émotion" d'assister à la reconnaissance ultime de cette religieuse "qui a aidé les enfants et les nécessiteux". Après la cérémonie, qui a duré environ deux heures, le souverain pontife, souriant, s'est livré à son traditionnel tour de "Papamobile" sur la place, embrassant et bénissant des bébés et saluant les fidèles massés derrière les barrières.