L'Union européenne (UE) signe dimanche un accord de partenariat pour 7,4 milliards d'euros avec l'Égypte, en pleine crise économique, notamment dans les domaines de l'énergie et des migrations, selon un responsable européen, sur fond d'inquiétudes d'ONG sur le volet migratoire du pacte. Cet accord sera signé en fin de journée au Caire entre le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, aux côtés de cinq chefs d'État et de gouvernements européens.
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Il comprend "cinq milliards d'euros de prêts dont un milliard versé avant fin 2024, 1,8 milliard d'investissements, 400 millions d'aide pour des projets bilatéraux et 200 millions d'aide pour des programmes portant sur les questions de migration", a détaillé ce haut responsable de la Commission européenne sous le couvert de l'anonymat. Cet afflux de fonds --qui s'étalera jusqu'à fin 2027-- est une bouffée d'air pour l'Égypte, qui traverse actuellement la pire crise économique de son histoire.
Le Caire, qui consacre une bonne partie de ses ressources au remboursement de sa dette extérieure, qui a triplé en une décennie pour atteindre près de 165 milliards de dollars, mise notamment sur son gaz naturel pour obtenir des revenus en dollars.
Gaz naturel et région difficile
L'UE, elle, veut "coopérer dans les domaines de l'énergie, plus particulièrement dans le domaine du gaz naturel liquéfié, pour s'éloigner encore plus du gaz russe", a affirmé à ce sujet le responsable européen, sur fond de guerre en Ukraine. Figurent notamment dans la délégation européenne en Égypte le président chypriote Nikos Christodoulides et les Premiers ministres grec Kyriakos Mitsotakis et italien Giorgia Meloni, de grands partenaires de l'Égypte dans ses champs gaziers en Méditerranée. Seront également présents à la signature de l'accord le chancelier autrichien Karl Nehammer et le Premier ministre belge Alexander De Croo.
La situation régionale --en premier lieu les conflits dans la bande de Gaza et au Soudan, frontaliers de l'Égypte-- seront également à l'ordre du jour. "L'Égypte est un pays crucial pour l'Europe, aujourd'hui et dans les jours à venir", car elle a "une position importante dans une région très difficile, avec des frontières avec la Libye, le Soudan et la bande de Gaza", a ainsi expliqué le haut responsable européen à des journalistes au Caire.
L'UE veut donc coopérer avec l'Égypte --136e pays sur 142 au classement mondial de l'État de droit du World Justice Project-- sur "la sécurité, le contre-terrorisme et la protection des frontières, en particulier la frontière sud", vu que "l'Égypte est sous encore plus de pression venant du Soudan". La bande de Gaza, où Israël est en guerre contre le mouvement islamiste palestinien Hamas, "ne sera pas l'objet principal de la discussion mais en fera partie", a ajouté le responsable.
Israël a fait monter d'un cran la pression sur l'Égypte en assurant avancer sur ses plans d'invasion de Rafah, ville palestinienne frontalière du Sinaï égyptien, où s'entassent plus de 1,5 million de Palestiniens, déplacés de guerre. Le volet migratoire de l'accord est du même type que celui signé en juillet avec la Tunisie : les Européens attendent des pays d'origine ou de transit des migrants qu'ils stoppent les départs et qu'ils réadmettent leurs ressortissants en situation irrégulière dans l'UE.
"Restriction de la liberté"
Pour l'ONG Refugees Platform in Egypt (RPE), l'UE veut "sous-traiter aux pays d'Afrique du Nord, en particulier l'Égypte (...) la restriction de la liberté de circulation des migrants". "Le schéma est le même que celui des accords bancals de l'UE avec la Tunisie et la Mauritanie : arrêter les migrants, ignorer les abus", alerte de son côté Human Rights Watch (HRW).
L'ONG affirme avoir "déjà recensé des arrestations arbitraires et des mauvais traitements infligés par les autorités égyptiennes à des migrants, des demandeurs d'asile et des réfugiés, ainsi que des expulsions" vers des pays en proie aux violences.
À trois mois des élections au Parlement européen où les sondages prédisent une poussée de l'extrême droite, les dirigeants européens sont soucieux d'afficher leur fermeté sur l'immigration irrégulière. L'Égypte répète que depuis 2016 aucun bateau de migrants n'a quitté ses côtes. Si les embarcations ne partent plus d'Égypte, des Égyptiens arrivent toujours en Europe par la mer, partis pour la plupart de Libye ou de Tunisie vers l'Italie. Frontex, l'Agence européenne des frontières, a recensé en 2023 près de 158.000 arrivées de migrants en Europe via cette route, la plus dangereuse au monde. Une augmentation de 50% par rapport à 2022.