Jeudi, Emmanuel Macron a reçu à Aix-la-Chapelle, en Allemagne, le prix Charlemagne, la plus prestigieuse des distinctions européennes. Honoré pour son engagement européen, le lancement des consultations citoyennes et l'initiative "Make our planet great again", destinée à préserver l'accord de Paris sur le climat, le chef de l'État a prononcé, en présence d'Angela Merkel, son quatrième discours sur l'Europe, après celui de la Sorbonne, d'Athènes et de Strasbourg.
"N'attendons pas. Agissons maintenant !" Le président français et la chancelière allemande sont engagés depuis des semaines dans des tractations compliquées pour tenter de se mettre d'accord sur une série de projets de refondation de l'Europe post-Brexit, en vue d'un sommet des dirigeants européens fin juin. Les discussions achoppent notamment sur les propositions françaises visant à doter la zone euro d'une budget d'investissement pour doper la croissance.
Pour l'Europe :
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 10 mai 2018
1. Ne soyons pas faibles. Choisissons.
2. Ne soyons pas divisés. Unissons-nous.
3. N'ayons pas peur. Osons faire.
4. N'attendons pas. Agissons maintenant.
"Fétichisme". "Ne soyons pas faibles et choisissons", a lancé Emmanuel Macron dans un discours émaillé de formules volontaristes. "Je crois à un budget européen beaucoup plus ambitieux (…) Je crois à une zone euro plus intégrée, avec un budget propre", a insisté le chef de l'État français, malgré les fortes réserves du gouvernement allemand. Berlin craint, par ce biais, de devoir payer pour les pays du Sud de l'Europe, à ses yeux trop dépensiers. Dans des propos inhabituellement durs, le chef de l'État français, qui fut élu sur un credo très pro-européen et a fait de ce dossier une grande priorité, s'en est pris à la timidité de l'Allemagne pour les dépenses et l'investissement. "En Allemagne, il ne peut y avoir un fétichisme perpétuel pour les excédents budgétaires et commerciaux, car ils sont faits aux dépens des autres", a-t-il lancé devant Angela Merkel.
Le nouveau gouvernement Merkel vient de confirmer le cap budgétaire très orthodoxe du pays : il n'y aura pas de déficit budgétaire pour les années à venir. La chancelière a reconnu que le sujet de l'avenir de la zone euro était épineux. "Oui, nous avons des discussions difficiles (avec la France)", a-t-elle dit dans son éloge pour le prix accordé à Emmanuel Macron. "Nous avons des cultures politiques et des manières d'approcher les sujets européens différentes", a-t-elle diplomatiquement commenté. Tout en se disant favorable à rendre la zone euro "plus résistante face aux crises".
LIVE | À l’heure de l’épreuve de vérité pour l’Europe, le Président @EmmanuelMacron reçoit le Prix Charlemagne et réaffirme sa détermination sans faille à refonder l’Europe.
— Élysée (@Elysee) 10 mai 2018
Suivez la cérémonie en direct : https://t.co/P3YewSMNRZ#Karlspreis
Plus de "protection américaine". Les deux dirigeants se sont en revanche retrouvés sur les autres réformes en Europe, dans les domaines de la défense ou de la politique étrangère notamment, face aux chamboulements impliqués par l'isolationnisme croissant des États-Unis. "Le temps où l'on pouvait compter tout simplement sur les États-Unis pour nous protéger est révolu", a dit Angela Merkel, et en conséquence "l'Europe doit prendre son destin elle-même en main".
Emmanuel Macron lui a fait écho en plaidant pour "faire de l'Europe une puissance géopolitique" et "diplomatique", et en critiquant implicitement la volonté des États-Unis de vouloir dicter leur conduite aux Européens, comme sur le nucléaire iranien. "Si nous acceptons que d'autres grandes puissances, y compris alliées, y compris amies dans les heures les plus dures de notre histoire, se mettent en situation de décider pour nous notre diplomatie, notre sécurité, parfois en nous faisant courir les pires risques, alors nous ne sommes plus souverains", a-t-il affirmé.
Suite à l'annonce du retrait de son pays de l'accord sur le nucléaire iranien, le président américain Donald Trump a menacé de sanctions les entreprises européennes qui continueraient à faire des affaires avec Téhéran. Les pays européens, au contraire, entendent maintenir l'accord, qui prévoit la levée de sanctions en échange d'un contrôle du programme nucléaire iranien, et ils demandent aux États-Unis de ne pas les en empêcher.