Le groupe djihadiste État islamique (EI) représente une menace grandissante en Afghanistan après sa défaite en Irak et Syrie, s'est inquiété dimanche le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian lors d'une visite à Kaboul.
Des actions presque chaque semaine. "Les combattants étrangers de l'EI, qui viennent d'un peu partout y compris de pays voisins de la Russie, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan, sont susceptibles de rejoindre des zones tenues par Daech (acronyme arabe de l'EI) ici en Afghanistan", a noté Jean-Yves Le Drian lors de cette visite éclair et sous haute surveillance. S'ils sont nettement moins nombreux que les talibans, les combattants se réclamant de l'EI sèment déjà la terreur en Afghanistan par des attentats dévastateurs contre les chiites. "Ils accroissent de façon assez impressionnante leurs capacités, avec des actions presque chaque semaine", souligne une source sécuritaire française. Pour l'instant, les talibans, qui contrôlent 40% du territoire, et l'EI "se combattent entre eux", relève Jean-Yves Le Drian. Mais "il faut éviter qu'il y ait des jonctions potentielles entre eux", a-t-il indiqué en marge d'un entretien avec le président afghan Ashraf Ghani.
La France ne renvoie pas de soldats. Jean-Yves Le Drian a fait le point sur la situation sécuritaire avec le chef des forces américaines et de la mission de l'Otan en Afghanistan, le général John Nicholson. Après avoir prôné un retrait d'Afghanistan, le président américain Donald Trump a opté en août pour une nouvelle approche et l'envoi de 3.000 soldats en renfort des 11.000 Américains déjà sur place. L'Otan a validé le 7 novembre cette nouvelle stratégie en décidant de faire passer de 13.000 à 16.000 hommes - en grande partie Américains - sa mission de conseil et d'assistance aux forces afghanes, qui subissent des pertes considérables face aux insurgés. Très engagée aujourd'hui sur le front antidjihadiste au Sahel, la France, qui a compté jusqu'à 6.000 hommes en Afghanistan avant de s'en retirer en 2012, n'a pour sa part pas l'intention de renvoyer des soldats dans ce pays. "Nous soutenons la présence ici des forces de l'Otan mais nous ne sommes pas partie prenante. Nous avons d'autres sujets, d'autres participations", a relevé le chef de la diplomatie française.
Séquelles de l'attentat près de l'ambassade française. Jean-Yves Le Drian, premier responsable français à se rendre en Afghanistan depuis juin 2013 - il y était alors venu en tant que ministre de la Défense - a aussi constaté les dégâts provoqués à l'ambassade de France par un attentat au camion piégé qui a fait 150 morts le 31 mai dans le quartier diplomatique. Personne n'a été touché côté français mais les séquelles sont encore visibles derrière les hauts murs et pare-vue antisnipers protégeant l'enceinte. La toiture s'est décollée du reste du bâtiment et l'impact du souffle de l'explosion, survenue à 300 mètres, reste visible sur les blindages des fenêtres. Des débris métalliques du camion et de la bombe sont alors tombés sur l'ambassade. Devant l'insécurité croissante, les services de l'ambassade ont étés transférés dans les villas où les diplomates résidaient et s'entassent désormais pour vivre et travailler. "Ils ont fait preuve d'un grand sang-froid, vivent dans des conditions précaires, très difficiles et portent une belle image de la France", leur a rendu hommage le ministre.