Migrants : ces dirigeants en première ligne au Conseil européen

Angela Merkel Emmanuel Macron
Angela Merkel, Emmanuel Macron et trois autres dirigeants européens seront sur le devant de la scène du Conseil européen. © Ludovic MARIN / AFP
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Les présidents et chefs de gouvernement de cinq pays jouent gros, jeudi et vendredi, au Conseil européen. Emmanuel Macron, Angela Merkel, Pedro Sanchez, Giuseppe Conte et Sebastian Kurz vont tenter de faire entendre leur voix.

La partie qui se joue à Bruxelles jeudi à partir de 14 heures s'annonce difficile. Les vingt-huit dirigeants d'autant de pays membres de l'Union européenne se réunissent à Bruxelles pour un Conseil européen consacré à l'épineuse question des migrants et de leur accueil (ou non) sur le Vieux continent. Parmi eux, cinq devraient particulièrement se faire entendre. Pour Emmanuel Macron, Angela Merkel, Pedro Sanchez, Giuseppe Conte et Sebastian Kurz, ce sommet revêt une importance particulière tant les enjeux sont grands sur la scène internationale comme dans leur pays respectif.

Angela Merkel : sauver son poste

Merkel

"C'est l'avenir de l'Union européenne qui est en jeu", avait déclaré la chancelière allemande à propos de la gestion de la crise migratoire. En réalité, c'est aussi le sien qu'Angela Merkel joue cette semaine. Celle qui semblait indéboulonnable quand tant de ses homologues ont dû quitter leur place est très fragilisée au niveau national, précisément en raison de sa politique migratoire. La conservatrice CSU, alliée bavaroise de la CDU, le parti de Merkel, menace de lâcher la chancelière si elle n'opte pas pour plus de répression et de fermeté à l'égard des migrants.

Angela Merkel n'a donc pas le choix : il faut que ce Conseil européen aboutisse afin qu'elle puisse revenir avec des solutions à soumettre à ses (peut-être futurs-ex) soutiens politiques. Si aucun accord n'est trouvé, même bilatéral ou trilatéral, une épreuve de force attend la chancelière à Berlin, avec le risque d'une démission de ses ministres CSU et d'une perte de majorité au Bundestag.

Emmanuel Macron : s'imposer comme le leader européen

Macron

Ce n'est un secret pour personne, Emmanuel Macron se rêve en nouveau bâtisseur européen. Profondément pro-Union européenne, le président français espère bien trouver une solution commune à la crise des migrants. C'est à cette condition qu'il peut espérer enclencher une nouvelle phase d'intégration européenne, en créant par exemple un budget de la zone euro. À l'inverse, un échec au Conseil européen ne ferait qu'acter les divisions trop profondes d'une Union européenne à bout de souffle.

Au niveau national, Emmanuel Macron a aussi tout intérêt à trouver une sortie par le haut. Sa position, nettement plus ouverte lorsqu'il était candidat que depuis qu'il est à l'Élysée, son refus d'ouvrir un port à l'Aquarius ou ses récentes déclarations contre les ONG qui œuvrent sur les bateaux humanitaires, lui ont attiré de nombreuses critiques

Pedro Sanchez : symboliser la gauche européenne

Sanchez

Fraîchement arrivé au pouvoir en Espagne à la faveur d'une motion de défiance contre Mariano Rajoy, Pedro Sanchez fait figure d'exception socialiste dans une marée de dirigeants plutôt conservateurs, voire d'extrême droite. Et c'est bien cette carte que le chef du gouvernement compte jouer, après avoir ouvert ses ports à l'Aquarius. Ce Conseil européen doit lui donner l'occasion de s'affirmer en tant que leader de gauche sur la scène internationale. Pedro Sanchez revendique une position équilibrée sur la question des migrants, avec "une politique migratoire contrôlée, qui sauve de nombreux êtres humains", comme il l'explique jeudi dans Le Monde.

Giuseppe Conte : s'affirmer et défendre les intérêts italiens

Conte

Pour l'Italie, les enjeux de ce sommet sont d'abord très concrets : trouver une solution immédiate à la vague migratoire, alors que les côtes italiennes sont les plus proches de la Libye et voient donc arriver plus de migrants que les autres. Le président du Conseil italien arrive donc au Conseil européen avec une série de propositions à soumettre à ses homologues : ouverture de centres d'identification en Libye, renforcement des contrôles aux frontières, abandon du règlement de Dublin. "Nous attendons des actes", a prévenu Giuseppe Conte jeudi midi, évoquant la "possibilité" d'un veto si Rome n'obtient pas satisfaction.

Mais Giuseppe Conte a également un intérêt politique à porter haut la voix de l'Italie. Président du Conseil encore inconnu il y a peu, il lui faut s'imposer sur une scène nationale saturée de personnages charismatiques et forts en gueule, notamment son ministre de l'Intérieur, Matteo Salvini.

Sebastian Kurz : préparer la présidence de l'Union européenne

Kurz

Plus jeune dirigeant du monde depuis qu'il a été élu en décembre dernier, le chancelier autrichien Sebastian Kurz, 31 ans, a un double intérêt dans ce Conseil européen. D'abord, asseoir sa position de médiateur entre d'un côté, le groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, République tchèque et Slovaquie), fermement opposé à l'accueil des migrants, et de l'autre les pays d'Europe occidentale. Sebastian Kurz veille en effet à garder des positions pro-européennes tout en s'affirmant comme l'un des dirigeants les plus conservateurs du Vieux continent, lui aussi contre l'ouverture des frontières aux migrants.

Ensuite, le chancelier autrichien prépare la présidence tournante de l'Union européenne, qu'il s'apprête à prendre le 1er juillet. Ce Conseil européen est pour lui l'occasion de se faire mieux connaître de ses homologues et de dévoiler des positions qu'il pourra ensuite défendre avec plus de latitude pendant six mois.