Pakistan : l'ex-Premier ministre arrêté, des manifestations dans le pays

Des manifestations ont éclaté au Pakistan après l'arrestation de l'ancien Premier ministre Imran Khan.
Des manifestations ont éclaté au Pakistan après l'arrestation de l'ancien Premier ministre Imran Khan. © Arif ALI / AFP
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avec AFP / Crédits photo : Arif ALI / AFP
Imran Khan, l'ancien Premier ministre du Pakistan, a été arrêté mardi lors de sa comparution devant un tribunal d'Islamabad. Il doit répondre à des accusations de corruption. Cette arrestation a provoqué des manifestations à travers le pays, réprimées notamment par des tirs de gaz lacrymogène.

L'ancien Premier ministre pakistanais Imran Khan a été arrêté mardi lors de sa comparution devant un tribunal d'Islamabad pour répondre d'accusations de corruption, provoquant des manifestations à travers le pays réprimées notamment par des tirs de gaz lacrymogène. La police a tiré des gaz lacrymogènes et utilisé des canons à eau pour disperser les partisans de Imran Khan qui manifestaient à Karachi (sud) et à Lahore (est). Des routes ont également été bloquées près d'Islamabad, ainsi que dans la ville de Peshawar à l'ouest de la capitale.

 

"Arrêté dans l'affaire Qadir Trust"

"Imran Khan a été arrêté dans l'affaire Qadir Trust", a indiqué le compte Twitter officiel de la police d'Islamabad, en référence à une affaire de corruption. Imran Khan qui souhaite revenir au pouvoir est visé par plusieurs dizaines d'affaires judiciaires depuis son éviction l'année dernière et avait réussi jusqu'ici à déjouer différentes tentatives d'arrestation. Une vidéo diffusée sur des chaînes de télévision locales montre Imran Khan poussé par des dizaines de paramilitaires dans une voiture blindée située à l'intérieur des locaux de la Haute Cour d'Islamabad.

"Alors que nous arrivions dans la salle de contrôle biométrique de la cour pour noter les présences, des dizaines de rangers nous ont attaqués", a déclaré à l'AFP Ali Bukhari, un avocat du PTI, le parti de Imran Khan. "Ils l'ont battu et l'ont traîné dehors", a-t-il ajouté.

"Une affaire illégitime", se défend Imran Khan

"Mes Pakistanais, au moment où ces mots vous parviendront, j'aurai été arrêté dans le cadre d'une affaire illégitime", déclare dans une vidéo pré-enregistrée Imran Khan, qui avait anticipé sa détention. "Les droits fondamentaux au Pakistan, les droits que nous confèrent notre constitution et notre démocratie ont été enterrés", ajoute-t-il. Son arrestation intervient au lendemain de la mise en garde de l'armée contre "les allégations sans fondement" prononcées selon elle par l'ex-Premier ministre.

Lors d'un rassemblement organisé ce week-end à Lahore, Imran Khan a de nouveau affirmé que le major-général Faisal Naseer, officier supérieur des services de renseignement, était impliqué dans sa tentative d'assassinat, début novembre 2022. L'ex-Premier ministre avait été blessé d'une balle dans la jambe lors de ce meeting. "Ces allégations fabriquées de toutes pièces et malveillantes sont extrêmement malheureuses, déplorables et inacceptables", a déclaré dans un communiqué le service des relations publiques interservices (ISPR) de l'armée.

"Il s'agit d'une tendance constante depuis l'année dernière. Les responsables de l'armée et des services de renseignement sont la cible d'insinuations et d'une propagande tapageuse visant à promouvoir des objectifs politiques", a-t-il déploré.

Le Premier ministre actuel condamne les accusations de son prédécesseur

Le Premier ministre Shehbaz Sharif, qu'Imran Khan a également accusé d'être impliqué dans le projet d'assassinat, a également condamné ces accusations. "Ses allégations sans aucune preuve contre le général Faisal Naseer et les officiers de notre agence de renseignement ne peuvent pas être autorisées et ne seront pas tolérées", a-t-il tweeté.

Les critiques à l'encontre de l'institution militaire sont rares au Pakistan, où les chefs de l'armée exercent une influence considérable sur la politique intérieure et la politique étrangère. Ils sont depuis longtemps accusés d'interférer dans l'ascension et la chute des gouvernements.

"Les hauts responsables de l'armée n'ont pas l'intention de réparer le fossé qui les sépare de Imran Khan", a souligné Michael Kugelman, directeur de l'Institut de l'Asie du Sud au Wilson Centre. La mise en garde de l'armée illustre à quel point les relations entre Imran Khan et la puissante armée du pays se sont détériorées. Elle l'avait d'abord soutenu dans son accession au pouvoir en 2018 avant de lui retirer son soutien, puis Imran Khan avait été évincé de ses fonctions par un vote de défiance du parlement en avril 2022.

Des élections anticipées avant octobre ?

Depuis, l'homme politique fait pression sur le fragile gouvernement de coalition pour qu'il organise des élections anticipées avant octobre. Officiellement, l'agression de Imran Khan est l'œuvre d'un tireur solitaire, qui dans une vidéo diffusée par la police avoue en être l'auteur et se trouve désormais en détention. Ces conclusions ont été rejetées par  Khan qui souligne que les autorités ont refusé ses tentatives de déposer un rapport de première information (RPI) auprès de la police pour désigner les "vrais coupables". "Il n'y a aucune raison pour que j'invente des faits", avait déclaré l'ex-Premier ministre dans une vidéo publiée mardi avant son arrestation.

Imran Khan est visé par plusieurs dizaines d'affaires judiciaires depuis son éviction, une tactique utilisée par les différents gouvernements pakistanais pour réduire au silence leurs opposants, estiment des analystes. La puissante armée pakistanaise exerce une immense influence dans le pays et a organisé au moins trois coups d'État depuis l'indépendance en 1947, régnant pendant plus de trente ans.