Le président philippin Rodrigo Duterte a dirigé un "escadron de la mort" lorsqu'il était maire de Davao, distribuant argent et instructions à la police ou à des tueurs pour éliminer des criminels, a affirmé lundi un ancien policier impliqué dans ces exécutions clandestines. Au risque de contredire une précédente déclaration sous serment, dans laquelle il démentait l'existence même d'un tel "escadron", Arturo Lascanas a déclaré devant le Sénat philippin qu'il était un des chefs de cette cellule qui a commencé à opérer lorsque Rodrigo Duterte était maire de la grande ville du sud de l'archipel, en 1988.
1.400 meurtres recensés. Le chef de l'État a plusieurs fois démenti toute implication dans des meurtres extrajudiciaires, que ce soit en tant que président ou pendant ses vingt-deux années de mandat à la tête de la municipalité de Davao. Selon des groupes de défense des droits de l'Homme, environ 1.400 meurtres suspects ont été recensés à Davao quand Rodrigo Duterte en était le maire. Le chef de la police de Duterte a déclaré que l'existence d'un escadron de la mort à Davao était une fiction inventée par les médias, mais Arturo Lascanas a déclaré lundi qu'il ne s'agissait pas d'un mythe. "C'est vrai, l'escadron de la mort de Davao existe", a-t-il dit. "Quand Duterte s'est installé pour la première fois dans le fauteuil de maire, nous avons commencé à 'sauver' des gens, ces personnes soupçonnées de crime à Davao. Nous avons appliqué les ordres personnels que nous donnait le maire Duterte."
Une femme enceinte et un enfant parmi les cibles. Selon l'ancien policier, les membres de l'escadron touchaient de 20.000 à 100.000 pesos (375 à 1.875 euros) par meurtre, en fonction de la "valeur" de la cible. Arturo Lascanas a livré des détails de son implication dans un attentat à la bombe contre une mosquée et l'assassinat d'une famille d'un kidnappeur présumé, parmi lesquels une femme enceinte, un jeune garçon et une personne âgée; des actions selon lui ordonnées par Rodrigo Duterte. Salvadore Panelo, conseil juridique du président, a dénoncé une "fabrication", un "nouveau récit erroné". Le témoignage de Arturo Lascanas est le deuxième à mettre en cause le rôle de Rodrigo Duterte à Davao, après celui d'un tueur à gages, Edgar Matobato, en septembre dernier.