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Pourquoi la guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis pourrait être source de tensions entre Elon Musk et Donald Trump

Grégoire Allain . 3 min
Pour Trump, Musk va permettre de mettre au jour des «centaines de milliards de dollars de fraude»
Illustration © AFP

Entretenant des relations privilégiées avec la Chine, et prônant la coopération et l'ouverture avec ce marché, Elon Musk navigue en eaux troubles, à l’heure où Washington et Pékin se livrent une guerre commerciale à coups de hausses de droits de douane. Une situation dont le multimilliardaire pourrait pâtir, du point de vue de sa relation avec le président américain.

Cela n’a échappé à personne, Donald Trump et la Chine ne sont pas les meilleurs amis du monde. Depuis le retour au pouvoir du milliardaire républicain, Washington a repris la guerre commerciale qui l’oppose à Pékin, en appliquant 10% de droits de douane supplémentaires sur les importations chinoises. Des mesures auxquelles a rétorqué la Chine, avec des taxes allant jusqu'à 15% sur les importations de charbon et de gaz naturel liquéfié (GNL) américains.

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Déficit commercial et guerre d’influence

Ces tensions s’expliquent notamment par l’envergure du déficit commercial des Etats-Unis avec la Chine, qui a frôlé les 300 milliards de dollars en 2024, mais également "un grand désenchantement marqué par les années Covid dévoilant les vulnérabilités existentielles de l’Amérique face à ce concurrent", indique Emmanuel Lincot, professeur à l’Institut Catholique de Paris et chercheur associé à l’Iris. Parmi elles, la crainte de voir Pékin encore un peu plus la surpasser dans le domaine des technologies de pointe (semi-conducteurs…).

Dans le cas où Donald Trump durcirait encore le rapport de force, son plus célèbre bras droit Elon Musk, qui considère à l’inverse la Chine comme un partenaire plus qu’un concurrent, pourrait voir son business sévèrement impacté. Et pour cause, son entreprise Tesla, dont la plus grande usine à l’étranger est basée à Shanghai, y a réalisé près de 40% de ses livraisons mondiales de véhicules l’an dernier. Elle vient également d’y ouvrir une usine de batteries pour 200 millions de dollars, renforçant son investissement sur le territoire asiatique.

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Musk "entre le marteau et l’enclume"

Du fait de sa dépendance au marché chinois, l’homme le plus riche de la planète apparaît comme assez vulnérable aux conséquences d'une évolution (négative) des relations sino-américaines. "Si Donald Trump décide d’intensifier sa guerre économique avec la Chine, il est évident qu'Elon Musk va la subir. Je pense qu’il est dans une sale position, entre le marteau et l'enclume", assure Jean-Eric Branaa, spécialiste en politique et société américaine et maître de conférences, qui n’exclut pas que ce dernier soit "instrumentalisé par les Chinois".

S’il bénéficie d’un traitement de faveur de la part du gouvernement chinois, la marque ayant par exemple obtenu le droit de posséder et d’exploiter une usine sans devoir s’associer à un partenaire local, Musk pourrait être contraint de "transmettre des informations sensibles, qu’il aurait obtenues soit via ses activités économiques, soit grâce à sa proximité avec Trump", indique Russel Honoré, lieutenant général à la retraite de l’armée américaine, dans une tribune publiée dans le New York Times. "Les lois du pays permettent au Parti communiste d’exiger des renseignements de toute entreprise opérant sur son territoire en échange de son accès au marché chinois", écrivait-il également en décembre dernier.

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Des intérêts propres à chacun

Une situation d’autant plus complexe pour le natif de Pretoria (Afrique du Sud) que si Tesla reste un moyen d’attirer les investisseurs étrangers, la Chine n’en est pas structurellement dépendante. "Il ne faut pas omettre la faculté des Chinois à copier avec une rapidité assez phénoménale. Je pense qu’ils ont la capacité de fabriquer leur propre Tesla", rappelle Jean-Eric Braana. Une partie de la fortune de Musk reposant sur les performances du constructeur automobile, la thématique chinoise pourrait ainsi tendre ses rapports avec Trump, si les mesures prises par ce dernier venaient à engendrer des représailles touchant (par exemple) les exportations de matériaux essentiels pour la production de Tesla. 

Les deux experts s’accordent en tout cas sur le fait qu’il ne devrait pas bénéficier d’arrangements de la part de Donald Trump sur ce cas précis, l’objectif du président américain n’étant "pas de sauver Tesla à tout prix, mais de veiller à défendre avant tout et plus globalement les intérêts américains", comme avancé par Emmanuel Lincot pour Europe 1. Preuve que parfois, même s’entourer des plus puissants n’est pas gage de disposer d’une abondance de leviers.