L'annonce a été qualifiée d'"historique" par le président ukrainien Volodymyr Zelensky tandis que l'ancien dirigeant russe, Dmitri Medvedev, l'a comparée à "du papier toilette". Vendredi, en fin d'après-midi, la Cour pénale internationale (CPI) a émis un mandat d'arrêt à l'encontre de Vladimir Poutine, présumé responsable du "crime de guerre de déportation illégale de population (enfants) et de transfert illégal de population (enfants) des zones occupées d'Ukraine vers la Fédération de Russie". À l'origine de cette guerre en Ukraine, qui sévit depuis plus d'un an désormais, le maître du Kremlin est donc désormais dans le collimateur de la plus haute juridiction pénale internationale.
Une compétence qui ne peut s'exercer dans tous les pays du monde
Concrètement, cette Cour, basée à La Haye aux Pays-Bas, est la seule habilitée à juger les auteurs de crimes internationaux. Créée lors de la Convention de Rome du 17 juillet 1998 avant son entrée en vigueur le 1er juillet 2002, elle se compose de 123 États, dont la France, mais sa compétence ne peut s'exercer partout dans le monde. La CPI peut simplement traiter les crimes commis par des ressortissants ou sur le territoire des États parties, ce qui n'est pas le cas de la Russie, ou bien des États non membres de la Cour mais qui reconnaissent sa compétence, ce qui est, en revanche, le cas de l'Ukraine. Les États parties sont de leur côté en charge de l'élection des 18 juges qui y siègent pour un mandat de neuf ans.
Dans le détail, la CPI se prononce dans les cas de génocide, de crimes contre l'humanité, de crimes de guerre ou de crimes d'agression. En théorie, elle ne peut se substituer à un État pour rendre justice mais peut intervenir dans le cas où ce dernier n'aurait pas été en mesure de le faire. Et peut donc émettre des mandats d'arrêt à l'encontre de dirigeants soupçonnés de s'être rendus coupables d'un ou plusieurs faits mentionnés plus haut. "Un mandat d’arrêt international est un mandat en vue d’arrêter l’individu et de le conduire devant la juridiction qui a réclamé ce mandat d’arrêt. L’immunité acceptée aux chefs d’État traditionnellement dans leur pays n’existe plus ici", a indiqué l'avocat William Julié, spécialiste du droit international, dans les colonnes du Parisien.
Poutine ne risque pas grand-chose dans l'immédiat
Par le passé, l'ancien chef de guerre serbe Ratko Mladic a lui aussi fait l'objet d'un mandat d'arrêt qui l'a conduit à comparaître devant le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY). Surnommé "le boucher des Balkans", il était accusé de génocide pour le massacre de Srebrenica en 1995 ayant coûté la vie à 8.000 musulmans en Bosnie. Sa condamnation à la prison à perpétuité a été confirmée en juin 2021. Mais s'agissant de Vladimir Poutine, l'issue pourrait être un peu différente, la Russie ne reconnaissant pas la compétence de la CPI sur son territoire. Par ailleurs, l'instance internationale ne dispose d'aucune force d'exécution capable de faire appliquer les mandats d'arrêt qu'elle délivre.
Par conséquent, à l'instant T, il est bien difficile d'imaginer le président russe être traduit devant la justice internationale à court terme, d'autant plus s'il ne s'aventure pas dans un pays membre de la CPI. Si tel était le cas, en revanche, le pays en question aurait l'obligation de procéder à son arrestation.