Ils étaient 500.000 à manifester dimanche soir dans tout le pays. Les Roumains ont poursuivi leur mobilisation à Bucarest ou Timisoara malgré le retrait du décret controversé dépénalisant la corruption. Après six jours de manifestations d'une ampleur inédite depuis la chute du communisme en 1989, les Roumains réclament plus du gouvernement.
Une autre mesure contestée. Dimanche, les manifestants ont déjà obtenu le retrait du texte réduisant les peines encourues pour abus de pouvoir. Ce décret introduisait un seuil minimum de préjudice d’un montant de 44.000 euros (200.000 lei). Les opposants à ce texte estimaient qu’il avait pour objectif de protéger certains élus dont Liviu Dragnea, le président du Parti social-démocrate (PSD) au pouvoir et en cours de procès dans une affaire d’emplois fictifs. En avril 2016, il a déjà été condamné à deux ans de prison avec sursis pour fraude électorale lors d'un référendum en 2012.
Les manifestants ont commencé leur mobilisation avant la sortie de ce décret, contre une réforme du code pénal qui prévoit de désengorger les prisons. 2.500 détenus pourraient être graciés, dont des élus emprisonnés pour corruption.
La corruption en ligne de mire. Membre de l’Union européenne depuis 2007, la Roumanie est évaluée chaque année par Bruxelles sur la lutte contre la corruption. Le dernier rapport de l’UE, publié fin janvier, salue une "tendance positive" dans le domaine. Mais d’après l’ONG Transparency international, le pays fait partie des plus mal classé en Europe sur le "sentiment de corruption".
Une impression partagée par les manifestants de ces derniers jours, qui accusent leurs dirigeants de manque de transparence. "Le gouvernement doit partir" fait partie des slogans les plus scandés dans la rue ces derniers jours. "Le retrait du décret n'est qu'un leurre" nous affirme Elena, une manifestante de la place Victoriei à Bucarest. Selon elle, le gouvernement va poursuivre sa politique de complaisance sur la corruption. "Cette attitude signifie qu'ils ne peuvent plus être au pouvoir car tout ce qu'ils veulent c'est couvrir leur corruption", poursuit-elle.
Proud to have been 1 of the 300 000 in #Bucharest and 1 of the 600 000 in #Romania tonite! #romanianprotest#rezist ✌Foto Dan Balanescu pic.twitter.com/kQmWtZvSky
— Ramona (@ZambyR) 5 février 2017
Le gouvernement reste ferme. Mais le pouvoir semble résolu à rester en place. Liviu Dragnea, le président du PSD, assurait dimanche soir : "Si les manifestations continuent après l’abrogation de ce décret, il deviendra clair qu’il s’agit d’un plan ourdi après les élections législatives" de décembre. Le PSD avait remporté les élections législatives fin 2016 avec 45,5% des voix.
Le Premier ministre s’est lui aussi montré ferme. Même s’il a retiré ce décret contesté il a exclu de démissionner par "responsabilité envers les gens qui ont voté". Un avis partagé par certains manifestants. Malgré sa mobilisation, Elena juge qu'il est "trop tôt pour que le gouvernement démissionne et je ne pense pas qu'ils le feront". Pourtant jeudi, le ministre des Milieux d’affaires, du Commerce et de l’Entrepreneuriat a annoncé sa démission. "C’est ce que ma conscience me dicte", a-t-il assuré.
Le Parti social-démocrate a déjà été chassé du pouvoir en 2015. Victor Ponta, le Premier ministre de l’époque, avait démissionné après l’incendie d’une discothèque qui avait fait 60 morts. Il était aussi accusé de corruption par les manifestants.