Royaume-Uni : le gouvernement se dit déterminé à expulser des migrants au Rwanda une fois sa loi votée

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Rishi Sunak a assuré lundi que son gouvernement était "prêt" à expulser des demandeurs d'asile vers le Rwanda d'ici 10 à 12 semaines. Une annonce qui intervient avant un vote du Parlement sur ce projet controversé. Un enjeu également électoral pour le Premier ministre.

Le Premier ministre britannique Rishi Sunak a assuré lundi que son gouvernement était "prêt" à expulser des demandeurs d'asile vers le Rwanda d'ici 10 à 12 semaines, avant un vote du Parlement sur ce projet controversé. Annoncé il y a deux ans par le gouvernement conservateur, et présenté comme une mesure phare de sa politique de lutte contre l'immigration clandestine, ce projet vise à envoyer au Rwanda les demandeurs d'asile - d'où qu'ils viennent- entrés illégalement au Royaume-Uni, notamment en traversant la Manche sur des canots pneumatiques.

L'enjeu est aussi électoral pour Rishi Sunak, au pouvoir depuis 18 mois, alors que les conservateurs sont donnés largement perdants des élections législatives qui se profilent. "Nous sommes prêts", "ces vols décolleront, quoi qu'il arrive", a martelé le Premier ministre lundi lors d'une conférence de presse, en détaillant les moyens humains et matériels mobilisés pour organiser de futures expulsions. "Le premier vol partira dans dix à douze semaines", a-t-il insisté, admettant que l'objectif initial de voir des vols débuter au printemps ne serait pas tenu.

 

Le projet de loi revient ainsi lundi devant les parlementaires, pour ce que le gouvernement espère être un ultime tour de débats entre les deux chambres avant un vote dans la soirée. Adossé à un nouveau traité entre Londres et Kigali qui prévoit notamment le versement de sommes substantielles au Rwanda en échange de l'accueil des migrants, le texte vise à répondre aux conclusions de la Cour suprême qui a jugé le projet initial illégal en novembre dernier.

Il définit notamment le Rwanda comme un pays tiers sûr. Or si le Rwanda se présente comme l'un des pays les plus stables du continent africain, son président Paul Kagame est accusé de gouverner dans un climat de peur, étouffant la dissidence et la liberté d'expression.

Le texte prévoit également que le gouvernement pourra outrepasser une éventuelle injonction de la Cour européenne des droits de l'homme à éviter les expulsions. "Aucune cour étrangère ne nous empêchera de faire décoller les avions", a insisté Rishi Sunak, répétant le mantra des conservateurs depuis que de premières expulsions vers le Rwanda avait été bloquées par la justice européenne.

Premiers migrants "identifiés"

Le projet de loi du gouvernement est fortement critiqué par l'opposition travailliste, des associations d'aides aux migrants, le chef de l'Église anglicane et jusqu'au Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme Volker Türk, qui a estimé qu'il va "à l'encontre des principes fondamentaux des droits humains". "Nous ne négligerons aucun effort pour identifier les personnes à risque et les orienter vers une assistance juridique", avait fait savoir dès la semaine dernière l'association Care4Calais sur X.

Lundi, le Labour a de nouveau attaqué le projet, la députée en charge de l'immigration Yvette Cooper, le jugeant trop coûteux pour ne concerner "qu'1% des demandeurs d'asile" présents dans le pays.

Après avoir atteint un record en 2022 (45.000), puis baissé en 2023 (près de 30.000), le nombre de personnes ayant traversé clandestinement la Manche à bord de canots de fortune a augmenté de plus de 20% depuis le début de l'année par rapport à l'an dernier.

Pour mettre en œuvre son projet, le gouvernement a mobilisé des centaines de personnels, notamment des juges, pour traiter rapidement les éventuels recours de migrants illégaux, et débloqué 2.200 places en détention pour eux en attentant que leurs cas soient étudiés, a précisé Rishi Sunak. Des "avions charter" ont été réservés pour effectuer ces expulsions, a-t-il ajouté, alors que selon des médias, le gouvernement a peiné à convaincre des compagnies aériennes de contribuer aux expulsions.

Il a mis le retard pris dans le projet sur le compte de l'opposition de la chambre haute du Parlement, où les conservateurs n'ont pas la majorité, et qui tente depuis des semaines d'adoucir le texte, par exemple pour exclure explicitement du champ des expulsions les ressortissants afghans ayant collaboré avec les troupes britanniques, ou encore pour que ce soit une organisation indépendante qui détermine si le Rwanda est un pays sûr. Ces amendements ont toujours été rejetés par les députés de la Chambre des Communes.