Mayschoss inondations allemagne 3:19
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Hélène Kohl, en Allemagne, édité par Romain David
Europe 1 s'est rendue dans la vallée de l'Ahr, en Allemagne, près d'un mois après les inondations meurtrières qui ont frappé la région. Si la plupart des gravats ont été déblayés, les habitations en ruine rasées, de nombreux habitants vivent encore dans des conditions précaires, privés d'électricité et d'eau courante.
REPORTAGE

Un mois après des inondations d’une ampleur historique dans l’ouest de l’Allemagne, comment vivent les habitants sur place ? Ces intempéries ont fait près de 200 morts et des dizaines de disparus. La zone sinistrée s’étend sur 50 km le long d’une petite rivière, affluent du Rhin, et que l’on traverse normalement à pied. Une enquête a été ouverte par le parquet de Coblence pour tenter de comprendre pourquoi le système d’alerte n’a pas fonctionné cette nuit-là.

Un paysage de désolation

Dans les petits villages au fond de la vallée de l’Ahr, les témoins sur place ne parlent pas d’inondations mais se disent victimes d’un "tsunami". En quelques minutes, une crue de 9 mètres a pulvérisé 60 ponts. L’asphalte des routes a été arraché. À certains endroits, on ne passe qu’avec des véhicules à chenilles ou des engins de chantier. Il y a des trous béants là où des maisons ont été emportées.

À Mayschoss, les habitants ont dû d’abord combler eux-mêmes la chaussée, pour permettre l’arrivée des secours, raconte Alina. "Quand on a parlé avec les soldats qui avaient fait des missions en Afghanistan, ils ont dit que c’était pareil ici", raconte cette sinistrée à Europe 1. "Certes, nous ne manquons de rien, personne ne meurt de faim, nous avons de quoi boire, nous avons reçu des tonnes de dons mais en ce qui concerne les destructions, c’est vraiment comme une zone de guerre."

Cette semaine, une commission a chiffré les dégâts à environ 30 milliards d’euros. À titre de comparaison, les dernières grandes inondations en Allemagne, en 2002, dans l’est du pays, avaient fait 9 milliards de dégâts. On pense qu’il faudra au moins trois ans pour reconstruire.

Privé d’eau courante

Après les premiers jours de chaos, l’Allemagne s’est mise en ordre de marche. Grâce au déploiement de l’armée, des services de la protection civile, des pompiers, de la police et aussi de milliers de bénévoles absolument indispensables, les travaux de déblaiement ont bien avancé.

On ne voit presque plus de tas de débris, de carcasses de voiture, les maisons sinistrées ont été complètement vidées ou même rasées. En revanche, l’électricité n’a toujours pas été rétablie partout, et le gros problème, c’est l’eau. Pas d’approvisionnement et surtout pas de système d’évacuation des eaux usées. Cette situation peut durer encore des mois, disent les spécialistes.

"Rester forts"

Certains sinistrés sont partis vivre chez des amis ou de la famille mais bien souvent les gens sont encore sur place, dans les étages supérieurs des maisons. Ils cuisinent avec des réchauds, vont remplir des bidons d’eau aux citernes de la Croix-Rouge. Il y a aussi des sanitaires communs. Et des hangars pleins à craquer de dons. On ne paie rien. On partage tout. Joudy Khalil, une jeune syrienne qui a vécu dans des camps de réfugiés, est touchée par la solidarité. "Tout le monde, Allemands ou étrangers, fait corps. Je n’ai jamais vu ça de toute ma vie. Les gens sont gentils, amicaux, et ils essaient de rester forts."

Mais derrière les sourires, les gens sont "en pilote automatique", s’inquiète Thomas Pütz, un entrepreneur local qui organise l’aide des bénévoles. "Nous sommes encore dans un état de choc. Beaucoup de gens sont traumatisés. Et puis cette poussière, qui rend tout triste et terne, porte sur la santé mentale. Nous avons besoin d’aide. Nous sommes tous très occupés avec les travaux, donc il faut que des gens fassent du porte-à-porte, pour nous demander comment ça va et nous prendre en charge", raconte-t-il.

Les premiers enterrements ont eu lieu cette semaine, mais il a d’abord fallu déblayer le cimetière complètement ravagé. De nombreux corps n’ont toujours pas pu être identifiés, ce qui rend encore plus douloureux le travail de deuil dans la région.