Depuis 1980, le rituel est immuable. Le 29 février, tous les quatre ans sort dans les kiosques français La Bougie du Sapeur, un pastiche humoristique et décalé de la presse française. Europe1.fr s'est procuré la Une du journal qui paraîtra donc mercredi prochain et vous la dévoile en exclusivité.
Voici la Une du numéro 9. Pour la voir en grand, cliquez-ici :
Pour vendre chaque 29 février 150.000 exemplaires de ce journal "drôle mais pas méchant", comme le qualifie son rédacteur en chef, Jean d'Indy, ce dernier peut compter sur un buzz naturel savamment entretenu.
Après environ 1.430 jours de silence qui suscitent l'attente et l'interrogation, la communication autour de la nouvelle Bougie s'active début février. L'absence de site Internet – labougiedusapeur.fr ou .com n'est pas près de voir le jour – contribue également à l'excitation des lecteurs avant la parution. Jean d'Indy, enfant du papier, l'assume en s'amusant. "Je crois que nous avons un problème avec l'immédiateté. Et puis moi, ce que j'aime, c'est l'odeur et le bruit du papier".
150.000 lecteurs, dont de nombreux collectionneurs
Une fois dans les kiosques, La Bougie du Sapeur est reconnaissable entre tous : le format, la maquette et le nom n'ont (presque) jamais changé en 32 ans d'existence. Jean d'Indy a bien pensé un temps, dans les années 1990, changer l'appellation du titre, "mais c'est impossible. Sur les 150.000 lecteurs, beaucoup ne se retrouveraient pas, et il y a aussi une grosse clientèle de collectionneurs".
Pour la maquette, il a tenu, là encore, à conserver une identité propre à La bougie, qui assume totalement son côté désuet et décalé dans le temps et dans le ton. "Depuis que j'ai pris les commandes de La Bougie, en 1992, j'ai juste rajouté des photos et instauré la couleur à partir du n° 4", comprendre en 1992, explique le rédacteur en chef qui ne dit jamais "il y a quatre ans" mais "l'année dernière" pour parler de l'exemplaire précédent.
Mots croisés, énigme et feuilleton
Le contenu de La Bougie du Sapeur vaut son pesant de francs... pardon d'euros. Les sujets improbables succèdent aux rubriques déjantées qui font sourire mais qui peuvent agacer. En remplissant la grille de mots croisés, ne comptez pas avoir les réponses avant le prochain numéro ! Idem pour le feuilleton. S'en prendre de passion risque de rendre les quatre ans d'attente insupportables. Et encore... "Nous en publions deux en simultané. Cette année, le feuilleton suivra celui du n°7", soit la suite de… 2004. Mieux vaut conserver les archives pour suivre l'histoire assidûment.
Pour l'énigme, Jean d'Indy joue l'usure. "On trouve que quatre ans pour la résoudre, c'est un peu court, alors on ne publiera la réponse du n°8 qu'en 2016", ironise-t-il, reconnaissant toutefois répondre par mail à ceux qui lui en font la demande.
DSK, sortie de l'euro et bière
Il ne faut pas attendre le 29 février pour suivre l'actualité. La bougie ne remplace pas un quotidien sérieux, qu'elle grime. Mais elle traite des mêmes sujets. L'immunité de DSK et du pape et la sortie de l'euro trônent en Une aux côté d'une tribune pour… que le demi de bière redevienne un vrai demi et non un quart ! Et qu'on prenne La Bougie au sérieux, elle qui menace "d'une manifestation dans les prochaines semaines, voire un boycott".
Rien n'est traité de manière sérieuse dans ce journal qui fonctionne grâce à sa rareté. "On m'a encouragé à faire un journal dans le même esprit tous les 1er avril. Mais je ne veux pas. Ce qui est rare est cher, dans le cœur des gens. Restons rare. C'est aussi pour cela qu'on parle beaucoup de nous quand on sort", reconnaît-il, appréciant "d'avoir la Une du journal présentée au 20 Heures de TF1 la veille de la sortie.
Un supplément coquin
Pour rendre sa Bougie encore plus rare, Jean d'Indy a trouvé une source de renouvellement inextinguible : des suppléments. En 2004, il lance La Bougie du Sapeur dimanche, destinée à ne paraître que les dimanche 29 février. Le prochain est attendu en… 2032. En 2008, le nouveau supplément s'appelle La Bougie du Sapeur Madame, et cette année, il propose La Bougie du Sapeur coquine, un quatre-pages encarté dans La Bougie classique.
Pour ce n°9, disponible à partir de mercredi, le rédacteur en chef ne change pas de formule. Le prix, fixé à 4 euros depuis l'an 2000, reste le même. "Ça fait un euro par an, c'est raisonnable".
La fin des abonnements
Seul bémol, les abonnements n'existent plus. Au début des années 2000, une campagne d'abonnement pour le XXIe siècle à 100 euros a été lancée, mais "on a été obligé d'arrêter. C'est devenu ingérable. Les gens ne prévenaient pas quand ils déménageaient", explique Jean d'Indy, qui explique compter en 2012 une "centaine d'abonnés".
La seule chose sérieuse dans La Bougie est sa gestion économique. Après être rentré dans ses frais et avoir mis suffisamment d'argent de côté pour le numéro suivant, Jean d'Indy fait un chèque à l'association "A tire d'ailes", qui s'occupe d'enfants autistes. "En 2008, on leur a fait un chèque de 10.000 euros", fait remarquer le rédacteur en chef, fier de son action. Une autre bonne raison de l'acheter.
>>> La bougie du Sapeur, n°9, en vente à partir de mercredi 29 février dans toute la France à 4 euros.