Vincent Bolloré voit de nouveau son nom réapparaître dans les médias. Mais cette fois-ci, ce n’est ni pour des rumeurs de disparition des Guignols de l’Info ni pour la nouvelle grille de rentrée du groupe Canal +. L’homme fort de Vivendi, la maison mère de la chaîne crytpée, est au cœur d’une toute autre histoire, révélée mercredi par Médiapart : il aurait censuré un documentaire sur le Crédit mutuel accusé de fraude fiscale, et qui devait être diffusé dans le magazine Spécial Investigation.
"Ils ont accepté au bout d’une semaine". Europe 1 a contacté Nicolas Vescovacci, l’un des réalisateurs du documentaire. "Au mois de mars dernier, j’ai récupéré pas mal d’éléments et de témoignages pour réaliser une enquête sur une filiale du crédit mutuel, la banque Pasche, qui est en Suisse. Je me suis rendu compte que Médiapart avait les mêmes infos. On a donc décidé de travailler ensemble et de sortir un film le plus rapidement possible", explique-t-il. Les journalistes prennent alors rendez-vous avec l’équipe de Spécial Investigation. "Ils ont accepté au bout d’une semaine", poursuit Nicolas Vescovacci, "le film avait été validé par la direction de Canal + jusqu’à Rodolphe Belmer (alors numéro deux du groupe, ndlr.)".
Quelques jours avant la diffusion… L’équipe se met alors au travail et tourne à partir du 2 avril. Le 15 mai, le film est terminé et une nouvelle fois validé, après visionnage par Canal +, et notamment par la direction juridique du groupe. Puis soudainement, très peu de temps avant la diffusion prévue le 18 mai, l’équipe du film a de plus en plus de mal à discuter avec la chaîne. "On apprend finalement par une discussion rapportée par notre producteur Renaud Van Kim, qui a eu Rodolphe Belmer au téléphone, que le film a été censuré". Mais aucune justification n’est donnée aux réalisateurs. "On a fait des demandes d’explication mais encore aujourd’hui, nous n’avons eu aucune réponse".
Les liens du Crédit mutuel avec Vincent Bolloré. Selon Médiapart, cette censure est "simple" à comprendre : "le Crédit mutuel est l’un des principaux partenaires financiers des activités du groupe Bolloré : Michel Lucas, son patron, est par ailleurs un intime de l’actionnaire majoritaire de la chaîne cryptée". Toujours d’après le site d’info, Vincent Bolloré aurait téléphoné à Rodolphe Belmer pour "faire valoir ses liens d’amitié avec Michel Lucas". Europe 1 a contacté le groupe Canal + mais la chaîne refuse de faire le moindre commentaire sur cette affaire.
Une diffusion sur France 3. "Cela fait quinze ans que je fais ce travail et je n’avais jamais vu de censure pareille", conclut avec amertume Nicolas Vescovacci. Mais tout n’est pas perdu pour le journaliste car c’est finalement France 3 qui a racheté le documentaire. Il sera diffusé à la rentrée, dans l’émission Pièces à Conviction.