C'est l'un des feuilletons les plus intenses de l'automne : les droits TV de la Ligue 1, détenus depuis cette saison par Mediapro. Pour l'instant, le groupe sino-espagnol refuse de payer les factures dont il doit s'acquitter pour la diffusion de la compétition. Dans ce dossier, l'ombre de Canal+, diffuseur historique de la Ligue 1, plane de nouveau.
À Canal+, ces jours-ci, on joue sur du velours et on affirme qu'on étudiera toutes les possibilités, y compris celle d'un retour en première ligne. Mais cela se ferait au juste prix, prévient-on. Car aujourd'hui, crise du Covid-19 oblige, le football est un produit dégradé. Les stades sont vides, il y a des matches reportés et le mercato estival était sans relief.
Téléfoot pour l'instant loin du compte
Par ailleurs, les audiences des autres sports diffusés sur Canal+ sont excellentes. La moto et la Formule 1 ont même dépassé le football ces dernières semaines, pour un coût bien moindre. Pas question, donc, de mettre la santé financière du groupe en péril, d'autant plus que Canal+ n'a pas perdu d'abonnés, malgré la perte de nombreuses affiches de Ligue 1. Il y a deux ans et demi, après l'annonce surprise de la victoire de Mediapro, pour un contrat de plus d'un milliard d'euros annuels, la chaîne cryptée avait dénoncé sur Europe 1 un montant économique irréaliste.
Aujourd'hui, trois mois après son lancement, la chaîne Téléfoot revendique environ 700.000 abonnés, encore loin des 3,5 millions espérés à terme pour la rendre viable. Le groupe espagnol a lui-même sifflé la mi-temps en ne payant pas sa traite d'octobre, d'un montant de 170 millions d'euros, ce qui met le football français un peu plus dans l'embarras. Mediapro s'est abrité derrière une conciliation judiciaire qui gèle tout. À la LFP, on s'active, mais on est pour l'instant pieds et poings liés.
Ferracci veut le retour de Canal+ et beIN
Dans ce contexte, quelques rares dirigeants sortent du silence pour réclamer le retour des diffuseurs historiques. "Je crois qu'ils mettent la LFP dans une position impossible", dénonce sur Europe 1 Pierre Ferracci, le président du Paris FC, actuel leader de Ligue 2. "J'espère que Vincent Labrune arrivera à ne pas rester dans un face-à-face mortifère avec Mediapro."
" La vraie négociation doit engager d'autres opérateurs avec un peu plus de sérieux que Mediapro "
Selon le patron du club parisien, "la vraie négociation, vendredi, doit engager d'autres opérateurs qui ont montré un peu plus de sérieux par le passé que Mediapro n'en démontre aujourd'hui. Elle doit réintroduire Canal, par exemple, mais peut-être aussi beIN SPORTS et peut-être Free dans la négociation, pour qu'on y voit plus clair." Pierre Ferracci tient à préciser que l'ensemble des clubs professionnels soutient Vincent Labrune, le nouveau président de la Ligue, engagé dans cette difficile négociation avec Mediapro.
Un rapprochement Mediapro-Canal+ ?
Le feuilleton se poursuit donc de plus belle. Selon nos informations, une nouvelle réunion avec le conciliateur judiciaire se tiendra jeudi après-midi, pour un résultat attendu à la fin du mois. "On ne lâchera pas, on ira au bout du contrat, on est solvable", confiait mercredi soir Mediapro France à Europe 1. Il est vrai que le groupe a récemment réglé une grosse centaine de millions d'euros à l'UEFA pour la diffusion de la Ligue des champions.
Le problème, c'est que la LFP estime que le contrat de confiance est rompu. La Ligue fera tout ce qui est légalement possible pour dénoncer le contrat et lancer, pourquoi pas, un nouvel appel d'offres. Il existe une troisième possibilité : Mediapro et Canal+ pourraient se rapprocher afin d'offrir un peu de répit au football français. Les droits TV représentent environ 40% des budgets des clubs, ce qui est énorme. À Canal+, on dit attendre des propositions raisonnables du groupe espagnol pour la diffusion de la chaîne ou même le rachat de certaines affiches, pourquoi pas le dimanche soir. Le chemin est encore long, mais la voix de la raison pourrait malgré tout l'emporter.