Un climat varois tendu. Au village, personne n'a envie de parler. Cela fait des mois que Roquebrune-sur-Argens vit au rythme des règlements de comptes politiques, des plaintes en diffamation, des soupçons, des enquêtes judiciaires, des colères et des dérapages verbaux de leur maire, Luc Jousse. Derniers dérapages en date : plusieurs tirades polémiques, laissant entendre qu'il aurait voulu voir brûler des Roms. Mais pourquoi va-t-il si loin ? Europe1 est allé prendre la température locale.
Des habitants de moins en moins tolérants. Si les habitants ne semblent pas soutenir la forme employée par leur maire pour critiquer les Roms, beaucoup admettent qu'il a raison de se saisir du problème. "Ce n'est peut-être pas ce qu'il a voulu dire, mais au moins, il y en a un qui a ramené sa fraise", confie l'un d'eux au micro d'Europe1. "Personnellement je ne l'aurai pas dit. Mais du côté des Roms, il a raison d'avoir dit ça. Ca devient de plus en plus insupportable", renchérit une autre. "Les Roms posent des problèmes. Même si en arriver là, ça me choque", poursuit une autre.
Le camp au centre des tensions. Dans le camp Rom, il reste huit caravanes, installées sur le bord de la nationale. Les caravanes sont délabrées et entourées de morceaux de carton et de ferraille. Neuf adultes et quatre enfants vivent au milieu. À une époque, il a compté jusqu'à 200 caravanes, venues de Nice, après avoir été expulsées d'un stade de rugby, raconte Var Matin. Et la cohabitation avec les Varois ne s'est pas toujours bien déroulée. En juin dernier, les gendarmes ont interpellé quatre membres du camp, après avoir découvert dans leurs caravanes de nombreux objets volés, dont du matériel informatique provenant de l'hôpital de Fréjus ainsi que… 10.000 euros de lames de rasoirs, détaille Var Matin.
"Le jugement d'expulsion des derniers Roms restant sur la commune nous a été délivré il y a maintenant deux mois. Et la sous-préfecture ne l'a toujours pas fait exécuter. Moi, c'est ça qui me met en rogne !", explique d'ailleurs le maire controversé dans les colonnes du quotidien local.
Un contexte électoral tendu. Si le maire se sent obligé de sortir les grands mots, c'est aussi parce qu'il se sait électoralement menacé. S’il avait était élu à 64% des voix en 2008, dès le premier tour, les choses se sont un peu compliquées pour lui ces dernières années. L’édile fait face à une fronde massive des diverses associations de la ville, qui lui reprochent une piètre gestion de la ville et des déboires judiciaires. Luc Jousse fait en effet l’objet d’une plainte pour escroquerie en bande organisée et d'une enquête préliminaire a été ouverte sur d'éventuels détournements et prises illégales d'intérêts. Un rapport de la Cour régionale des comptes révélait également, en 2013, que l'endettement de la ville est trois fois supérieur à la moyenne des villes de même taille. Résultat, le FN se sent pousser des ailes. "Luc Jousse est fragilisé par les affaires. Roquebrune fait partie des villes gagnables, comme Fréjus ou Six-Fours-les-Plages", affirme ainsi à Mediapart Frédéric Boccaletti, secrétaire départemental du FN.
Des habitants pas tous séduits. Pas sûr, toutefois, que la radicalisation du maire ne fasse mouche. "Il fait son grand bonhomme, son grand guerrier, comme d'habitude", lâche ainsi un habitant auprès d'Europe1. Un autre regrette un "dérapage" et un dernier conclut même, amer : "vu ce qu'il se passe, la politique, je n'ai pas envie de m'y intéresser".
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