Un poste de l'ombre aux contours flous, désormais en pleine lumière après les révélations du Canard enchaîné, mardi : Penelope Fillon a été employée en tant qu'attachée parlementaire de son mari François Fillon et de son suppléant, pendant huit ans, selon le "Canard enchaîné". Au total, elle aurait perçu 500.000 euros brut. Davantage que Nadia Copé, également épinglée en 2014 pour avoir été assistante de son époux et député de Seine-et-Marne, Jean-François Copé.
Une centaine de députés concernés. Le fait d'employer un membre de sa famille au poste d'attaché parlementaire est pourtant loin d'être un fait rarissime, à en croire le député socialiste René Dosière : "Au début de l'année 2016, un député sur six employait parmi ses collaborateurs un membre de sa famille." Environ 100 députés auraient, selon ce spécialiste de la gestion des finances publiques, recours à ces emplois familiaux, des chiffres qui rejoignent les calculs de Mediapart en 2014.
Plafond fixé à la moitié de l'enveloppe parlementaire. Ni exceptionnelle, ni interdite, cette pratique est toutefois réglementée par l'Assemblée nationale. "L'intéressé ne peut pas toucher plus de la moitié du crédit destiné à payer les collaborateurs", rappelle René Dosière. La somme totale dont dispose le parlementaire étant de 9.561 euros, un conjoint ne peut donc pas toucher plus de 4.780 euros pour son salaire. Dans ses révélations, le "Canard enchaîné" indique que Penelope Fillon a pu toucher jusqu'à 7.900 euros quand elle était l'assistante de Marc Joulaud, suppléant de François Fillon de 2002 à 2007, car elle n'était alors pas soumise à ce plafond réservé aux conjoints.
Opacité sur les tâches des collaborateurs. En revanche, la nature des tâches et la quantité de travail fournie par un collaborateur parlementaire sont bien moins claires. "Il n'y a aucun contrôle autre que celui du parlementaire, qui emploie le collaborateur. L'Assemblée n'a pas d'autorité hiérarchique sur les parlementaires, qui sont complètement autonomes", insiste René Dosière pour qui "on ne peut pas savoir" ce que les collaborateurs exécutent. Seuls leurs noms sont rendus publics depuis 2014 et l'affaire Cahuzac.
"Je n'ai jamais travaillé avec elle". "A priori, il n'y a pas de raison de penser qu'il s'agit d'un emploi fictif", mesure René Dosière. "Dès lors que la procédure est égale, la présomption d'innocence doit fonctionner", ajoute-t-il. Mais cette absence de transparence sème le doute : "Je n’ai jamais travaillé avec elle. Je ne la connaissais que comme femme de ministre", assure d'ailleurs au "Canard enchaîné" Jeanne Robinson-Behre, alors assistante parlementaire de Marc Joulaud. Ces pratiques sont-elles nouvelles ? En 1999, Le Nouvel Observateur rapportait déjà les observations d'un parlementaire : "10% maximum des épouses de députés rémunérées effectuent un vrai boulot". Dans la tourmente, le camp Fillon a déjà réagi pour désamorcer les soupçons d'emploi fictif : Thierry Solère, un des porte-parole du candidat de la droite, affirme que Pénélope Fillon "a toujours travaillé dans l'ombre, car ce n'est pas son style de se mettre en avant".