Loi immigration : les 32 départements de gauche refusent de restreindre l'allocation autonomie
Le durcissement des conditions de versement aux étrangers de l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA), prévu dans la nouvelle loi immigration, ne sera pas appliqué par plusieurs départements dirigés par la gauche. À la mi-journée, les départements de la Seine-Saint-Denis et du Lot ont publiquement annoncé qu'ils refusaient d'appliquer la "préférence nationale".
La fronde contre la loi immigration monte au niveau local : plusieurs départements dirigés par la gauche, dont la Seine-Saint-Denis, ont annoncé mercredi qu'ils n'appliqueraient pas le durcissement des conditions de versement aux étrangers de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). À la mi-journée, les départements de la Seine-Saint-Denis et du Lot ont publiquement annoncé qu'ils refusaient d'appliquer la "préférence nationale" prévue selon eux par la loi controversée adoptée mardi à l'Assemblée nationale avec les voix du Rassemblement national. Le département de la Gironde a également indiqué dans l'après-midi à l'AFP suivre la même ligne de conduite.
6,38 millions d'euros en 2021
"Je mettrai tout en œuvre pour que le Département soit un bouclier républicain face à la préférence nationale. Tous les habitants de Seine-Saint-Denis méritent la solidarité et l'humanité. D'où qu'ils viennent. Nous continuerons de verser l'APA aux étrangers en situation régulière", a déclaré sur X le socialiste Stéphane Troussel, qui dirige le conseil départemental de ce territoire de banlieue parisienne qui compte une part importante de personnes issues de l'immigration.
"Vous savez, dans notre pays, un article de la Constitution, l'article 72, dit que les collectivités locales s'administrent librement. Et donc nous avons aussi la possibilité de mettre en œuvre des politiques publiques, des actions, des projets, des prestations volontaristes", a-t-il indiqué au micro d'Europe 1.
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La controversée loi sur l'immigration instaure un délai de cinq ans pour les étrangers non-européens en situation régulière qui ne travaillent pas, et de trente mois pour les autres, avant d'être éligibles à des prestations comme les allocations familiales ou l'APA, versée aux personnes âgées de 60 ans ou plus en situation de perte d'autonomie. Les versements d'APA ont représenté un montant de 6,38 millions d'euros en 2021, selon les chiffres communiqués à l'AFP par l'association Départements de France.
"Idées de Vichy"
Peu de temps avant, le département du Lot avait été le premier à s'opposer aux nouvelles modalités de versement de l'APA. "Le Département du Lot, fidèle à ses valeurs de solidarité, refuse et refusera d'appliquer le principe de la préférence nationale pour nos aînés", a affirmé dans un communiqué Serge Rigal (DVG, ex-PS), président du conseil départemental, qui propose de "créer une nouvelle allocation d'autonomie universelle qui donnera exactement les mêmes droits aux Lotois qui seraient exclus par cette loi". Selon le Lot, l'article 19 de la loi immigration, votée définitivement mardi, "instaure le principe de la préférence nationale" pour l'APA.
Dans un mail interne adressé aux agents du département de Seine-Saint-Denis, dont l'AFP a eu connaissance, Stéphane Troussel a dénoncé une "loi de peur, de haine et d'exclusion (...) qui trace une frontière en droit entre les Français et les étrangers en situation régulière". "C'est la raison pour laquelle le Département continuera à verser ses prestations aux mêmes conditions qu'aujourd'hui, à tous les habitants de Seine-Saint-Denis, quelle que soit leur origine ou leur nationalité", a-t-il détaillé.
Le président PS du conseil départemental de Gironde, Jean-Luc Gleyze, a lui estimé que "nous touchons du doigt une France qui risque de voir revenir, blanchies, les idées de Vichy". "Nous voilà dans une situation où nous ne devons plus seulement garantir les droits universels, mais d'abord nous battre pour les protéger de dangereuses logiques électoralistes, financières et/ou xénophobes", a-t-il indiqué dans une déclaration transmise à l'AFP.
Les départements souhaitent maintenir l'allocation personnalisée d'autonomie qui peut monter jusqu'à 940 euros par mois pour les personnes les plus dépendantes. Pour financer ces mesures, les départements devront puiser dans leur budget ou creuser leur déficit, car l'État ne prendra pas en charge ces dépenses supplémentaires.