Christine Lagarde a-t-elle fait preuve de "négligence", en 2007, en autorisant une procédure d'arbitrage privé à trancher dans l'affaire de la revente d'Adidas opposant Bernard Tapie au Crédit Lyonnais ? C'est ce que doit déterminer, à partir de lundi, la Cour de justice de la République (CJR). Chargée, depuis sa création en 1993, de juger les membres du gouvernement ayant commis des délits pendant qu'ils exerçaient leurs fonctions, cette juridiction d'exception mêle magistrats et politiques.
"Des centaines de pages à lire". Sur les 15 membres de la Cour, trois sont des hauts magistrats, douze des parlementaires. Six députés et six sénateurs sont obligés de délaisser leur circonscription pendant plus d'une semaine pour siéger à temps plein à Paris. "C'est un moment assez grave", confie Jean-Luc Warsmann à Europe 1. Le député Les Républicains des Ardennes a eu accès aux pièces du dossier, "des centaines de pages à lire". "On a également eu des éléments de la défense et on va entendre toutes les personnes convoquées par les différentes parties."
Oublier sa couleur politique. Est-il facile d'oublier sa couleur politique lors d'un tel procès ? "Oui, complètement", assure l'élu. "Quand vous auditionnez beaucoup de personnes, au bout d'un moment, vous jugez et vous vous faites votre avis." Sur le papier, pourtant, il semble mal aisé de juger la patronne du FMI, ministre de l'Économie de Nicolas Sarkozy entre 2007 et 2011. "Franchement, ce n'est pas quelque chose qui m'impressionne, j'ai totalement écarté ce facteur de ma réflexion", balaie Nathalie Nieson, députée socialiste de la Drôme. "On s'attachera à ce que le droit, et seul le droit, soit respecté."
Vote à bulletin secret. À l'issue des débats, qui pourront se dérouler jusqu'au 20 décembre, chacun des juges votera à bulletin secret et la décision se prendra à la majorité absolue. Ce n'est que la cinquième fois que la CJR se réunit depuis sa création. La dernière fois, c'était en 2010 pour juger Charles Pasqua. Elle l'avait condamné à un an de prison avec sursis pour complicité d'abus de biens sociaux et complicité de recel dans l'affaire des contrats de la Sofremi. Au total, la CJR a déjà condamné trois ex-ministres.