Assurance-chômage, formation professionnelle : la méthode Macron survivra-t-elle aux prochaines réformes ?

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Emmanuel Macron rencontre les syndicats jeudi et vendredi. © Michel Euler / POOL / AFP
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Emmanuel Macron entame les réunions préparatoires des réformes de l’assurance-chômage, de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Le président va reproduire la méthode utilisée pour les ordonnances travail.

L’encre de la signature des ordonnances travail a tout juste eu le temps de sécher mais Emmanuel Macron repart à l’attaque. Le président de la République reçoit jeudi et vendredi les partenaires sociaux pour leur présenter les réformes de l’assurance-chômage, de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Alors que la grogne sociale peine à prendre de l’ampleur, le président compte bien reproduire la méthode qui lui a permis de faire passer la réforme du code du travail sans trop d'encombre cet été.

Écoute et pédagogie. Au cœur de la "méthode Macron", un mot : dialogue. Jugeant que la consultation organisée pour la réforme du travail a porté ses fruits, Emmanuel Macron va jouer la même partition pour les réformes à venir. En l’occurrence, il va recevoir séparément chaque syndicat et organisation patronale pour évoquer les pistes actuellement à l’étude pour chacune des trois réformes. Le locataire de l’Élysée va prendre le temps de faire de la pédagogie et d’écouter les revendications des divers partenaires sociaux. Puis, dans les semaines et les mois à venir, les réunions avec le gouvernement se succéderont pour faire avancer les dossiers.

Mais Emmanuel Macron ne se contente pas de parler et d’écouter tout le monde. Il sait aussi manœuvrer en fonction des forces en présence. Cet été, en marge des réunions officielles entre les syndicats et Muriel Pénicaud, le chef de l’État a reçu en secret Laurent Berger et Jean-Claude Mailly, respectivement secrétaires généraux de la CFDT et Force ouvrière. Résultat, en septembre, aucun des deux syndicats n’a appelé à manifester contre les ordonnances et la CGT s’est retrouvée isolée, presque marginalisée. Et la contestation n’a pas pris dans la rue.

Les lignes rouges des syndicats. Cependant, ce n’est pas parce que la méthode Macron a fonctionné une fois qu’elle connaîtra le même succès pour les prochaines réformes. En effet, certains points risquent de provoquer des frictions, notamment concernant l’assurance-chômage. L’exécutif entend ainsi bouleverser la gouvernance du régime pour résorber le déficit. Gérée depuis 1958 par les syndicats et le patronat, l’assurance-chômage pourrait passer, selon la promesse de campagne de Macron, dans les mains de l’État qui piloterait le dossier aux côtés des acteurs historiques. Cette remise en cause du paritarisme irrite profondément les trois organisations patronales et les cinq syndicats représentatifs. En juillet, ils se sont même fendus d’un communiqué commun exceptionnel pour mettre en garde le président.

Sur le fond, l’extension de l’assurance-chômage aux indépendants et aux démissionnaires ne devrait pas rencontrer d’opposition de la part des partenaires sociaux. Mais la question du coût et du financement est cruciale. Or, Emmanuel Macron pourrait bien avoir parlé un peu vite lors de la campagne. Selon Les Échos, cette double extension pourrait coûter au minimum deux à trois fois plus cher que prévu, le gouvernement ayant mal anticipé l’effet d’aubaine qui pousserait certains salariés à démissionner, attirés par ces nouveaux droits. Pour éviter une réforme ruineuse, le gouvernement pourrait être contraint de revoir à la baisse les règles d’indemnisation. Mais les syndicats ne laisseront pas passer.

Les syndicats déjà chauds. D’autant plus que si la réforme du code du travail est déjà signée et ne demande qu’à être promulguée, les syndicats ont encore un goût amer dans la bouche. Ceux qui étaient opposés, à des degrés différents, au contenu des ordonnances, ne désespèrent pas d’arriver à mettre sur pied une journée d’action unitaire, même si cela semble improbable au vu des divergences persistantes. A ce titre, le timing précoce des réunions de jeudi et vendredi est à quitte ou double pour eux. D’un côté, elles arrivent dans une grosse séquence sociale et les syndicats sont prêts à se mobiliser rapidement. De l’autre, Macron peut lessiver les syndicats en passant aussi vite d’une réforme à l’autre.

 

 

 

Le début d’un long processus

Les premières réunions ont lieu cette semaine mais la préparation, l’écriture et l’adoption des prochaines réformes prendront du temps. Le gouvernement veut présenter un projet de loi pour l’assurance-chômage, la formation professionnelle et l’apprentissage "au printemps 2018". La formation professionnelle bénéficie déjà des 15 milliards dédiés au sein du Grand plan d’investissement présenté fin septembre. L’ouverture de l’assurance-chômage aux démissionnaires et aux indépendants doit entrer en œuvre dans le courant de l’été. Enfin, les mesures pour l’apprentissage s’étaleront, elles, sur les deux prochaines années.