Le conseil d’Etat a globalement validé jeudi la révision de la Constitution envisagée par l’exécutif. Dans son avis, il a considéré que la déchéance de nationalité pour les binationaux nés en France et condamnés pour des faits de terrorisme peut être mise en oeuvre, à condition d’être inscrite dans la réforme constitutionnelle en question.
Réserves à gauche. C’est politiquement que cette mesure coince : plusieurs ministres et députés, ainsi que le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, ont exprimé leurs réserves sur cette mesure. Le Premier ministre lui-même a dit qu’il la jugeait symbolique, inefficace et qu’on pourrait au final s’en passer. Sauf que François Hollande s’était fortement engagé à la mettre en oeuvre, lors de son discours devant le Congrès après les attentats du 13 novembre. "Nous devons pouvoir déchoir de sa nationalité française un individu condamné pour une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou un acte de terrorisme", avait-il déclaré.
Hollande acculé. Il faut comprendre que la prise de position de Manuel Valls génère beaucoup d’agacement - le mot est faible - dans les couloirs de l’Elysée. Elle met François Hollande dans une position intenable : il a le choix entre la peste et le choléra. Soit il maintient la déchéance de nationalité, seul contre tous, au risque de fracturer encore plus sa fragile majorité. Soit il renonce, ce qui sera perçu non seulement comme un reniement, mais surtout comme un coup porté à son autorité. Qui plus est, sa réforme constitutionnelle sans la déchéance aurait d’autant moins de chance d’obtenir les voix de la droite au Congrès.
Une idée de Valls. Un ami du président de la République exprime sa colère en rappelant quelques éléments factuels : "la déchéance de nationalité, l’idée est venue quelques heures après les attentats lors d’une discussion entre François Hollande, Bernard Cazeneuve et Manuel Valls. Et d’ailleurs c’était son idée !". L’idée de Manuel Valls qui, après analyse politique, invite aujourd’hui à y renoncer.
Décision imminente. A l’Elysée, on ne l’entend pas de cette oreille. "La décision, ils vont la prendre ensemble, et ils l’assumeront ensemble", explique un autre ami du chef de l’Etat. Ce choix va être fait dans le courant du week-end ou, au plus tard, lundi ou mardi. Le projet de loi, avec ou sans déchéance de nationalité, devra être présenté mercredi en conseil des ministres.