Le Président veut son discours sur l’état de l’Union, à l’image du président américain qui, à peine entré en fonction, prononce un discours devant les parlementaires. Depuis son élection Emmanuel Macron ne s’est pas adressé directement aux Français, et il veut le faire sans passer par le filtre médiatique, en l'occurrence par le Congrès, dès le début de la saison parlementaire. Pour dire quoi ? "Nous allons passer cinq ans ensemble, voilà l’état du pays et voici les défis que j’identifie pour mon quinquennat".
Démonstration de force de l’exécutif.La date évoquée est celle du 3 juillet, soit 24 heures avant le discours de politique générale du Premier ministre devant l’Assemblée nationale. C’est une option qui n’est pas encore définitivement arrêtée, mais qui est pensée, argumentée même par l’Elysée. L’idée, c’est de faire porter deux discours successivement par le président le lundi et le Premier ministre le mardi, deux discours construits ensemble, articulés ensemble. Les défis, le cap pour le président, la méthode, le rythme pour le Premier ministre. Une mise en scène de l’exécutif pour marquer sa puissance face à la majorité parlementaire, la mettre aux ordres et en ordre de marche.
Une partition trop lourde pour le Premier ministre ? Le risque, néanmoins, c’est que la parole du président écrase celle du Premier ministre. Et Matignon, d'abord séduit par le plan raffiné et audacieux de l’Elysée, se montre très refroidi depuis que la date du 3 juillet a fuité dans la presse. Parce qu’évidemment, la subtilité de la communication d’Emmanuel Macron va à l'encontre des usages républicains. La puissance d’un président de la République s’exprimant devant le congrès, discours concordants ou non, réduira considérablement la portée du discours de politique générale de son Premier ministre 24 heures plus tard.
La scrupuleuse répartition des rôles à laquelle veille Emmanuel Macron, entre un président en retrait et un Premier ministre réhabilité dans sa fonction après deux quinquennats qui l’ont réduit au rang de collaborateur, cette belle architecture deviendrait bien fragile. L’effet cacophonique de cette partition alambiquée risquant même de nuire aux deux interprètes.