François Fillon a été mis en examen mercredi dans l'affaire des emplois fictifs présumés de sa famille. La justice a étendu son enquête aux costumes qui ont été offerts au candidat à la présidentielle. Invité dans l'émission C'est arrivé cette semaine, Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel à la Sorbonne, analyse cette évolution judiciaire.
"Un tournant". La mise en examen est un "tournant dans cette triste campagne", de l'avis de Dominique Rousseau. Elle traduit le fait que "désormais, le juge d'instruction lui-même considère qu'il y a un certain nombre d'éléments qui justifient" cette mise en examen pour "recel de biens sociaux, détournements de fonds publics et déclarations mensongères à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique." L'opinion publique a également été impactée d'après le professeur de droit. "La position de François Fillon dans les sondages est plutôt autour de 17/17,5% que 19/20%."
"La justice doit exercer son action". La justice a ainsi bouleversé le calendrier électoral, par sa simple action. Les magistrats soulignant au passage qu'il n'y a pas de démocratie sans justice. "Il n'y a pas de trêve judiciaire. On en a beaucoup parlé, ça n'existe pas", affirme Dominique Rousseau. "Dans aucun texte, il n'est dit que la justice doive suspendre son action pendant les campagnes électorales. Elle doit même exercer son action puisque les Français vont élire le président de la République, que la justice fasse son travail avant pour que les citoyens soient sûrs d'élire quelqu’un qui mérite leur confiance."
La suspicion. Cette campagne se fait ainsi sous le sceau de la suspicion, dirigée vers François Fillon mais aussi Marine Le Pen, également empêtrée dans les affaires et avec des interrogations sur la déclaration de patrimoine d'Emmanuel Macron. Le phénomène ne concerne pas que la France, souligne le constitutionnaliste, qui cite les manifestations contre la corruption du gouvernement roumain, l'action menée au Brésil contre la corruption ou même le printemps arabe tunisien qui a pris sa source "dans la corruption de Ben Ali."
"Au moins qu'ils soient honnêtes". "Il y a un phénomène général des sociétés, des citoyens, demandant davantage d'éthique. Un peu comme si, conscients que les hommes politiques ne pouvaient plus inverser la courbe du chômage, réduire les inégalités, ils demandaient : 's'ils sont inefficaces, au moins, qu'ils soient honnêtes'", résume Dominique Rousseau pour qui toutes ces affaires ne font "couler la démocratie".