Photos interdites, journalistes tenus à l'écart, impossibilité de communiquer avec l'extérieur... La rencontre entre Emmanuel Macron et les chefs de partis, qui se tient mercredi à la maison d'éducation de la Légion d'honneur de Saint-Denis, près de Paris, revendique la confidentialité la plus totale. Pour l'heure, il apparaît quasiment impossible de déterminer ce qu'il en ressortira. Mais ce mardi, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, également en charge du renouveau démocratique, a dévoilé les premiers contours d'un possible nouvel outil démocratique : le "préférendum".
Sur BFMTV, l'ancien ministre de la Santé a tenu à clarifier : "Je ne dis pas que c'est ce qui est sur table", a-t-il notamment déclaré, tout en rappelant qu'"aucune porte [n'était] fermée". En ayant recours au préférendum, le gouvernement opterait pour un outil permettant "de tester plusieurs sujets à la fois au cours d'un même vote", indique Olivier Véran, évoquant "des multiples questions" posées aux Français. "Le reproche que l'on fait souvent au référendum, c'est que l'on dit que les Français votent pour ou contre celui qui pose la question. Peut-être qu'en posant plusieurs questions, les gens vont pouvoir se lâcher sur un item et pouvoir répondre sur le fond à l'ensemble des autres questions", argumente l'intéressé.
Olivier Véran (@olivierveran): "Le Président est ouvert à faire un référendum, et même un 'préférendum'" pic.twitter.com/8mOGyg5Hre
— BFMTV (@BFMTV) August 28, 2023
Poser plusieurs questions lors d'un référendum, c'est possible
La forme concrète que pourrait prendre ce nouvel outil est encore loin d'être tranchée. "C'est ce dont il faudra discuter avec les chefs de partis", indique Olivier Véran. En attendant, se pose d'ores et déjà la question de la constitutionnalité d'une telle initiative. Sur ce point, l'horizon semble dégagé pour le gouvernement dans la mesure où l'article 11 de la Constitution, qui encadre le recours au référendum, n'interdit pas de soumettre plusieurs questions aux Français.
En revanche, un référendum est traditionnellement organisé après l'élaboration d'une loi préalablement discutée entre les deux assemblées. "Dans ce cas de figure, il s'agit pour le peuple français de la ratifier, de dire s'il est d'accord ou pas d'accord", résume Anne-Charlène Bezzina, maître de conférence en droit public à l'Université de Rouen. Or le dispositif, évoqué par Olivier Véran, semble s'écarter de ce processus législatif classique. "Au fond, cela ressemble un peu aux conventions citoyennes, à un grand sondage", estime la constitutionnaliste.
"Il n'y a aucun engagement à la clé"
Plutôt que de répondre par "oui" ou pas "non", les Français pourraient être amenés à livrer des réponses plus larges : "Favorables", "Défavorables", "Urgent", "Pas urgent", etc... "Or lorsque vous faites dire cela au peuple français, il n'y a aucun engagement à la clé", fait remarquer Anne-Charlène Bezzina. En clair, nul nécessité pour l'exécutif d'élaborer une loi en lien avec les résultats de ces préférendums. "Je crains que nous soyons dans quelque chose qui n'ait pas les vertus du référendum", complète la spécialiste. S'ajoutent, par ailleurs, de possibles difficultés d'organisation autour de ces référendums d'un nouveau genre. "Il faudrait des urnes pour les Oui, pour les Non, pour les 'Ne se prononce pas' etc", illustre-t-elle.
Quant aux thèmes qui pourraient être soumis au vote, le flou persiste également. Jordan Bardella, le président du Rassemblement national, exhorte le chef de l'État à organiser un référendum sur l'immigration. Or ce sujet n'apparaît pas dans ceux égrenés par l'article 11 de la Constitution. Pour contourner l'obstacle, Olivier Véran a ainsi évoqué l'hypothèse d'un "pré-référendum", autrement dit une grande consultation nationale autour de sujets "qui ne peuvent pas faire l'objet d'un référendum d'après la Constitution".