Les tueries de Charlie Hebdo et de l'Hyper Cacher, l'attaque du Bataclan, mais aussi celles du Thalys et de Saint-Quentin-Fallavier : lors de son passage au ministère de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve fut pendant deux ans en première ligne face à la menace terroriste grandissante. Le socialiste, qui relate son expérience dans son livre, A l'épreuve de la violence, revient notamment sur la lutte menée alors par le gouvernement contre l'islamisme radical. Un combat nécessaire selon lui, mais difficile, alors que la question de l'islam continue de diviser à gauche. "Je n'ai jamais fait la moindre concession" à l'égard de l'islamisme, rappelle-t-il, samedi, au micro d'Europe 1.
"Je suis conscient que cette fracture existe" à gauche, reconnait-il, interrogé par Patrick Cohen. "Il y a eu une partie de la gauche qui, lorsque l’État se dotait des moyens prévus par l’État de droit lui-même pour réagir à cette violence, parlait d'islamophobie ou stigmatisait l’État d’urgence comme une sortie de l’État de droit alors qu’il n’était rien d’autre qu’un instrument pour protéger la République contre une violence extrême".
"Cette fracture là", explique Bernard Cazeneuve, "il faut la surmonter et aussi affirmer la volonté de la République de prendre tous ses enfants dans ses bras, et notamment les musulmans de France". Et l'ancien maire de Cherbourg de rappeler que de nombreux musulmans ont eux-mêmes trouvé la mort dans les différents attentats ayant frappé la France depuis 2015.
"J'ai entretenu avec les musulmans de France un dialogue respectueux et exigeant"
La grande majorité des musulmans, rappelle-t-il, "sont dans une conception de leur religion très respectueuse des principes de la République et sont dans la honte du comportement de ceux qui sont dans le dévoiement de leur religion, cherchent à semer partout la violence, la division et la terreur". Ces musulmans, ajoute l'ex-"premier flic de France", "je les ai toujours appelé a faire entendre d’avantage leurs voix, à s’exprimer d’avantage parce qu’ils sont aussi la fierté de la République dans l’attachement qu’ils ont dans la valeur du vivre-ensemble et dans les valeurs républicaines qui constituent notre héritage commun".
"Il faut que les musulmans prennent d'avantage la parole", avance toutefois l'ancien Premier ministre. "Dans le contexte particulier dans lequel nous nous trouvons, nous avons besoin d'entendre les musulmans dire leur attachement à la République". Mais, précise-t-il, "pour que cette expression puisse avoir lieu, il faut que le dialogue avec les musulmans soit constant. Il faut qu'il n'y ait pas d’ambiguïté de la part de ceux qui sont à la tête de l'État". Évoquant sans la nommer la polémique actuelle sur le voile, qui divise au sein même de l'exécutif, Bernard Cazeneuve estime qu'"il ne faut pas qu'il y ait des débats sur la question de la laïcité au sein du gouvernement qui donnent le sentiment de la confusion". Et de conclure : "Les Français ne peuvent faire bloc qu'à partir du moment où il y a une clarté sur les valeurs".