L'entreprise agricole américaine Monsanto aurait secrètement fiché "des centaines de personnalités" françaises en fonction de leur position sur les pesticides, et notamment du glyphosate, un herbicide dont l’utilisation fait polémique depuis plusieurs années. Ce travail de fichage aurait notamment été réalisé avec l’appui de la société Publicis Consultants, selon des révélations du Monde et de France 2.
"Il y a deux capitales mondiales du lobbying, Washington et Bruxelles. Forcément, ces lobbyistes font du 'mapping', c’est-à-dire qu’ils cartographient leurs alliés et leurs adversaires", explique au micro de Matthieu Belliard, dans Le grand journal du soir sur Europe 1, Pascal Canfin, le numéro deux de la liste La République en marche pour les élections européennes. "C’est ce qu’a fait ce cabinet pour Monsanto, et je peux vous dire, pour le savoir, qu’ils le font tous !", déplore-t-il.
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"C’est illégal et, parfois, c’est complètement erroné", relève l’ancien directeur général du WWF France. "Les députés européens sont fichés en fonction de leur position sur tel ou tel dossier, c’est la même chose pour les journalistes", assure Pascal Canfin. "Je pense que l’industrie du plastique fait la même chose. Les industries du pétrole et du gaz ont fiché pendant des années, avec l’entreprise Exxon aux États-Unis, les parlementaires qui voulaient lutter contre le dérèglement climatique", rappelle-t-il.
Un membre de la liste LREM fiché comme "allié potentiel"
Parmi les noms apparus dans le fichage réalisé par Monsanto figure celui de Jérémy Decerle, un agriculteur de 35 ans, ancien président du syndicat Jeunes agriculteurs et … numéro quatre sur la liste LREM pour les européennes. Il y est classé comme "allié potentiel" par la firme. "Je l’ai eu au téléphone. Il me dit que, dans ce fichier, il est classé comme ‘utilisateur de glyphosate’", précise Pascal Canfin. "Il n’a jamais, me dit-il, utilisé lui-même de glyphosate pour la simple et bonne raison qu'il est éleveur et, dans l'élevage, on n’utilise pas de glyphosate", défend-il, toujours sur Europe 1. Il rappelle par ailleurs que ce document date de 2016, "au début du débat sur le glyphosate".
"On doit absolument mettre davantage de transparence dans les pratiques de lobbying", plaide encore Pascal Canfin. "Le lobby, par construction, a horreur de la transparence, de la lumière, en revanche, il adore l’opacité", relève-t-il. Et de rappeler l’une des propositions portées par la liste qu’il défend pour les élections du 26 mai : "Que tous les députés européens qui rencontrent des lobbies soient obligés de rendre cette rencontre publique."