C'est la première fois depuis des mois qu'ils vont s'adresser la parole. François Hollande et Benoît Hamon se retrouvent jeudi, à 11 heures, à l'Élysée. Un rendez-vous fixé juste après le second tour de la primaire de la gauche, qui a vu l'ancien ministre de l'Éducation l'emporter largement face à Manuel Valls. Et qui promet d'être cordial, à défaut d'être très chaleureux.
Frondeur. Entre les deux hommes en effet, les relations se sont considérablement assombries depuis que Benoît Hamon a été débarqué du gouvernement, fin août 2014, après ses critiques envers la ligne social-libérale de François Hollande. Engagé notamment contre la politique, trop restrictive selon lui, d'accueil des réfugiés, la déchéance de nationalité et la loi Travail, l'ancien ministre avait même signé une motion de censure –finalement non débattue faute de signataires- contre le gouvernement. Le chef de l'État en a été profondément blessé, comme le racontent les journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme dans Un président ne devrait pas dire ça… "Le plus grave, c'est la présence de Hamon" sur la liste des signataires, confiait-il même à Manuel Valls.
Jamais sur la même ligne. Même avant que cette provocation, les deux hommes ne s'entendaient pas particulièrement bien. Ils n'ont jamais été sur la même ligne : en 2003, lorsque Benoît Hamon se lance dans l'aventure du Nouveau Parti socialiste, c'est pour s'opposer à François Hollande. Opposition qui durera jusqu'au Congrès du Mans, en 2005, lorsque François Hollande propose d'intégrer le NPS à sa motion. Benoît Hamon opte alors pour le compromis et intègre la direction du PS, sans pour autant transiger avec ses convictions. En s'affirmant hostile au traité constitutionnel européen en 2005, il se heurte ouvertement à François Hollande.
Mépris. Le passage à la direction du PS de Benoît Hamon n'a donc pas franchement permis aux deux hommes de se rapprocher. Idéologiquement, ils sont impossibles à réconcilier. Personnellement, ils n'ont pas beaucoup d'estime l'un pour l'autre. "Hamon, il abandonne le PS, il est quoi ? Pas grand-chose ?", lançait, méprisant, François Hollande en mars 2015. Le mépris est réciproque. "Hollande n'a même pas essayé une politique de gauche", reprochait Benoît Hamon dans les colonnes du quotidien L'Indépendant en août 2016.
Discours adouci. Pendant la campagne, François Hollande s'est tenu très en retrait. Au point, cependant, de ne même pas féliciter publiquement le vainqueur dimanche soir, préférant saluer la victoire…de l'équipe de France de handball aux championnats du monde. C'est Benoît Hamon qui l'a contacté, vers 20h30, pour le prévenir. Depuis, l'ancien ministre a d'ailleurs quelque peu adouci son discours jusque-là très critique envers le quinquennat. Leur rencontre de jeudi matin doit permettre à l'ancien ministre de l'Éducation de faire un pas de plus vers le rassemblement de la gauche. Et de profiter des conseils d'un vétéran des campagnes électorales, lui aussi élu via une primaire. Qui plus est, François Hollande possède encore de solides ancrages sur le terrain et peut lui apporter un appui bienvenu.