Un nouveau bras de fer judiciaire ? Le ministère des Affaires étrangères a décidé de porter plainte contre l'avocat Juan Branco. Rapide rappel des faits : à la suite des répressions des manifestations contre l’incarcération de l’opposant sénégalais Ousmane Sonko le 1er juin, son avocat, Juan Branco, a annoncé porter plainte pour crime contre l’humanité. Lors d'une conférence de presse le 22 juin, l'avocat accuse spécifiquement deux coopérants français en les citant par leur nom, avant de communiquer les données personnelles de l’un d’entre eux, comme son numéro de téléphone ou son matricule. Avec sa plainte, Juan Branco a également cité le nom de cinq autres agents.
Le ministère des Affaires étrangères demande que l’avocat soit rappelé à l’ordre
Dans deux tweets publiés quelques jours avant la conférence, les 11 et 13 juin, l’avocat avait déjà dénoncé de manière arbitraire une implication de ces deux coopérants français dans les violences au Sénégal, qu’il qualifiait de crimes contre l’humanité. Il avait donc appelé à révéler leurs identités. Dans le second tweet, Juan Branco avait annoncé avoir identifié tous les militaires français intégrés au commandement de la gendarmerie sénégalaise, soulignant un prétendu rôle de la France dans la répression des violences.
C'est pour ces propos que le Quai d'Orsay est monté au créneau. Selon les informations d'Europe 1, le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères demande que l’avocat soit rappelé à l’ordre. Le ministère a déclaré porter plainte en application de l’article 40 (ndlr : l’article selon lequel tout autorité ou fonctionnaire est contraint de signaler un crime ou un délit dont il a la connaissance).
"La France porte plainte contre moi. Mon pays. Mon peuple. Ma patrie. Pourquoi ? Pour avoir révélé la commission de crimes contre l'humanité", s'est défendu dans un tweet Juan Branco à la suite de la plainte du ministère. "Le Quai d'Orsay ne les a jamais dénoncés. Nous ne céderons à aucune intimidation. Pour qu'ailleurs, on puisse continuer à se dire : oui, il y a en France, encore, des êtres qui ont du courage, des valeurs, un rapport à l'honneur, à l'intégrité, et à la dignité. Pour que notre pays ne puisse être humilié, et encore une fois, rabaissé parce que certains êtres auront décidé de le souiller."
Les masques tombent.
— Juan Branco ✊ (@anatolium) July 12, 2023
La France porte plainte contre moi.
Mon pays. Mon peuple. Ma patrie.
Pourquoi ? Pour avoir révélé la commission de crimes contre l'humanité.
Tandis que ceux-ci sont commis sans jamais être dénoncés, ceux qui les exposent sont harcelés et persécutés.
Les… pic.twitter.com/sLKTYKQbtE
Déjà au cœur de plusieurs polémiques
L’avocat et activiste politique, classé à l’extrême-gauche et mis en examen pour viol en 2021, a déjà été au cœur de plusieurs polémiques : il a notamment été accusé d’avoir participé à la diffusion de la vidéo de Benjamin Griveaux pour provoquer sa chute en tant qu’avocat de Piotr Pavlenski. Il a également été accusé d’une tentative de défense de Salah Abdeslam, après une lettre datée d’octobre 2016, dans laquelle il lui suggérait de "congédier ses conseils", et lui donnait plusieurs recommandations pour sa défense.
Un délit de mise en danger de la personne
La situation au Sénégal demeurant extrêmement tendue, les deux agents français, dont l’identité est désormais connue, ne sont plus en sécurité et sont directement exposés à toute forme de représailles. Les faits de dénonciation de Juan Branco peuvent caractériser un délit de mise en danger de la personne prévu par l’article 223-1-1 du Code pénal qui a été créé après l’affaire Paty.
Le texte fut adopté dans la loi du 24 août 2021 "confortant le respect des principes de la République". Il dicte que "le fait de révéler, de diffuser ou de transmettre, par quelques moyens que ce soit, des informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d'une personne, permettant de l'identifier ou de la localiser, aux fins de l'exposer ou d'exposer les membres de sa famille à un risque direct d'atteinte à la personne ou aux biens que l'auteur ne pouvait ignorer est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende".