Il y a des commémorations qui rassemblent et d’autres qui, au contraire, divisent. La commémoration des accords d’Evian, qui ont mis fin à la guerre d’Algérie le 18 mars 1962, appartient à la seconde catégorie. Et l’annonce pour la première fois d’une participation du président de la République François Hollande à cette commémoration a ravivé la "guerre des mémoires", comme l’a fait remarquer sur Europe 1 l’historien Benjamin Stora. Mais qu’est-il passé le 18 mars 1962 et après cette date ?
Que s’est-il passé le 18 mars 1962 ? Dans un communiqué daté du 18 mars 1962, Louis Joxe, ministre d’Etat chargé des affaires algériennes, annonce que la délégation française et les membres du Front de libération nationale (FLN) représentés par Krim Belkacem sont parvenus à un accord pour mettre fin aux combats engagés depuis le 1er novembre 1954 en Algérie.
Le document comporte 93 pages et décrète très exactement un cessez-le-feu qui rentre officiellement en vigueur le lendemain le 19 mars. Mais le texte prévoit surtout l’organisation rapide d’un référendum afin que les populations "choisissent leurs destins". Dès le 8 avril, les Français sont invités à se prononcer sur les accords d’Evian qu’ils approuvent à une très large majorité (90,81%). En Algérie, un référendum d’autodétermination se déroule le 1er juillet 1962 et le "oui" l’emporte à 99,72% des suffrages exprimés.
Pourquoi Evian a-t-elle été choisie ? Cette ville des Alpes françaises a été désignée pour être le siège de la conférence entre les représentants du gouvernement français et ceux du FLN parce qu’elle était proche de la Suisse où séjournaient les indépendantistes algériens. Les deux délégations ont séjourné onze jours à l’Hôtel du Parc de la ville avant de parvenir au cessez-le-feu.
Pourquoi cette date fait-elle polémique ? Pour ceux qui s’opposent au choix de cette date, à l’instar de Nicolas Sarkozy qui s’est fendu ce vendredi d’une tribune dans Le Figaro, le 19 mars n’est pas synonyme de paix pour tous. La guerre s’est poursuivie "pendant des mois" après, écrit l’ancien chef de l’Etat. Pour l’historien Benjamin Stora, effectivement "il y a eu une sortie de guerre épouvantable", marqué par des exactions. Les massacres des harkis, ces civils algériens utilisés comme supplétifs de l'armée française, ont en effet continué bien après cette date. Mais selon Benjamin Stora, la date du 19 mars 1962 est aussi "fondamentale" pour le "1,5 million de jeunes hommes qui sont allés en Algérie" : "elle signifie la fin des épreuves, le fait de retrouver sa famille et son travail".