Peut mieux faire ! Le Conseil d’Etat demande au gouvernement de revoir sa copie sur le projet de loi de moralisation de la vie publique. Un projet de loi porté par François Bayrou, et qui sera présenté en Conseil des ministres mercredi. Mais dans un avis, dont la valeur n’est que consultative et que le journal Le Monde a pu consulter, les hauts fonctionnaires du Palais royal se montrent très critiques sur l'une des dispositions phares du texte : la banque de la démocratie.
Lors de la présentation de son projet de moralisation début juin, le garde des Sceaux avait voulu cette banque comme une réponse aux difficultés rencontrées par certains partis, et notamment le FN, de souscrire des prêts pour financer leurs campagnes électorales. Mais pour le Conseil d'Etat, ce dispositif pose deux problèmes, sur la forme et le fond :
Un dispositif trop flou. En vérité, dans le projet de loi présenté au Conseil, il n'est plus question de créer cette banque mais d'autoriser le gouvernement à légiférer sur ce sujet, plus tard, par ordonnances. Pour les hauts fonctionnaires du Palais royal, cela montre "la très grande indétermination" de l'exécutif. Ces derniers dénoncent également une étude d'impact beaucoup trop sommaire et arrivée tardivement sur leur bureau ; ils se plaignent d'ailleurs des conditions dans lesquelles ils ont dû examiner ce dispositif. En clair, dans sa volonté de rapidité, le gouvernement a rendu une copie brouillonne.
Un banque superfétatoire ? Sur le fond, le Conseil s'interroge sur l'utilité même de cette banque, se demandant en quoi elle serait nécessaire, alors que le projet de loi prévoit déjà la création d'un médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques, qui serait lui-même chargé de garantir la transparence du financement de la vie politique. Finalement, le Conseil d'Etat suggère au gouvernement d'abandonner carrément cette idée, et de confier la mission à une banque déjà existante via un appel d'offres. Une solution que les hauts fonctionnaires estiment plus proportionnée et viable financièrement.
Deux mesures inconstitutionnelles. Outre cet avis défavorable, le reste du projet a été validé par le Conseil d'Etat à l'exception de deux mesures, purement et simplement retoquées car jugées inconstitutionnelles, précise Le Monde. Ainsi, la séparation au sein des partis des fonctions d'ordonnateur des dépenses et de payeur, voulue par François Bayrou, s'oppose à l'article 4 de la Constitution qui garantit la liberté d'organisation des mouvements politiques. Quant à la disposition selon laquelle la Cour des Comptes pourrait être chargée de certifier les comptes des partis, elle serait contraire à la liberté d'entreprendre, "car elle écarte sans raison valable les commissaires aux comptes de ce marché", souligne le quotidien.